Fake or not fake : la lutte contre les fausses informations

fausses informationsL’actualité récente pendant les périodes électorales révèle la nécessité de légiférer contre les fausses informations.

Un Tweet, un reTweet, ça y est la rumeur est lancée… La diffusion massive des fausses informations représente un enjeu sociétal majeur. La proposition de loi relative à la lutte contre les fausses informations du 21 mars 2018 [1] prévoit de nouvelles obligations à la charge des plateformes et une nouvelle action en référé.

L’arsenal juridique existant

Pour lutter contre les fausses informations, plusieurs textes spéciaux existent déjà, notamment :

De nouveaux outils contre les fausses informations pendant la période électorale

L’objectif de la proposition de loi relative à la lutte contre les fausses informations est clair :

  • fournir des outils efficaces pour lutter contre d’éventuelles opérations de déstabilisation par la diffusion massive de fausses nouvelles
  • lesquelles pourraient survenir lors d’échéances électorales.

En amont : des nouvelles obligations pour les plateformes en ligne

La proposition de loi prévoit donc d’imposer aux plateformes des obligations de transparence renforcées.

L’article L. 163-1 du Code électoral prévoit ainsi une nouvelle infraction incriminée par l’article L. 112 dudit Code.

Pendant la période de convocation des électeurs et jusqu’à la fin des opérations de vote, « les opérateurs de plateforme en ligne au sens de l’article L. 111-7 du code de la consommation dont l’activité dépasse un seuil de nombre de connexions sur le territoire français », seront tenus à de nouvelles obligations. Au nombre de ces obligations figurent les obligations de :

  • donner à l’utilisateur une information loyale, claire et transparente sur
    • l’identité et
    • la qualité de le personne qui verse à la plateforme des rémunérations en contrepartie de la promotion de contenus d’information ;
  • rendre public :
    • le montant des rémunérations reçues en contrepartie de la promotion de contenus d’information et
    • l’identité des personnes desquelles elles les ont reçues dépassant un montant fixé par décret.

Ces nouvelles obligations spécifiques à la lutte contre les fausses informations en période électorale, viendraient ainsi compléter les dispositions de droit commun de l’article L. 111-7 du Code de la consommation imposant aux opérateurs de plateformes en ligne une obligation de loyauté à destination des consommateurs.

En aval : une nouvelle action en référé

Une fois les fausses informations propagées, la seule option reste la saisine d’un juge. A cet égard, l’article 1er de la proposition de loi prévoit d’introduire une nouvelle action en référé.

Limitée aux périodes pré-électorale et électorale, cette action introduite à l’article L. 163-2 du Code électoral ne pourra être engagée que devant le Tribunal de grande instance de Paris. En effet, au regard du caractère national de l’influence d’une diffusion massive de fausses informations, ce dernier aura une compétence exclusive.

L’objet de cette action se restreindrait aux faits constituant des fausses informations :

  • de nature à altérer la sincérité du scrutin à venir,
  • diffusées en ligne de manière à la fois massive et artificielle.

Il a été précisé qu’« artificielle » devait notamment s’entendre comme signifiant « par le biais de contenus sponsorisés ou promus au moyen d’outils automatisés autrement appelés bots ».

Le juge saisi en référé devra se prononcer dans un délai de 48 heures et pourra ordonner toutes les mesures aux fins de faire cesser cette diffusion, telles que :

  • le déréférencement du site ;
  • le retrait du contenu en cause ;
  • l’interdiction de sa remise en ligne ;
  • la fermeture du compte d’un utilisateur ayant contribué de manière répétée à la diffusion de ce contenu ;
  • ou encore, le blocage d’accès au site internet.

Des obligations renforcées pour les plateformes en ligne hors période électorale

Hors période électorale, la proposition de loi relative à la lutte contre les fausses informations prévoit une modification de la loi pour la confiance dans l’économie numérique du 21 juin 2004 pour étendre le devoir de coopération des plateformes.

En effet, les plateformes numériques auront pour obligation de :

  • mettre en place « un dispositif facilement accessible et visible permettant à toute personne de porter à leur connaissance ce type d’informations » s’ajoutant à leur obligation existante de « notice and take down » ;
  • informer « promptement les autorités publiques compétentes de toute activité de diffusion de ces fausses informations » et « de rendre publics les moyens qu’elles consacrent à la lutte contre les diffusions de fausses informations ».

Conclusion

La problématique des fausses informations pendant et hors périodes électorales conduit à une nécessaire conciliation entre liberté d’expression, liberté du commerce et de l’industrie, droit à l’information et préservation de la sincérité du scrutin. Reste à voir comment le texte évoluera au fil de la procédure parlementaire…

Lexing Alain Bensoussan Avocats
Lexing Contentieux numérique

(1) Proposition relative à la lutte contre les fausses informations enregistrée à l’Assemblée nationale le 21 mars 2018.

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