L’exploitation de films publicitaires au delà de l’autorisation de l’acteur

Un acteur et un annonceur ont conclu un contrat d’une durée de trois ans, prévoyant l’exploitation de films et de photographies pour promouvoir une marque sur différents supports publicitaires (télévision, internet, affichage, presse, publicité sur lieux de vente). La diffusion télévisée était limitée à 400 passages par an. Il a été convenu que l’acteur percevrait une redevance de 694.624 euros (soit 231.541 euros/an).

Au terme de la première année d’exécution du contrat, l’acteur a saisi le Tribunal, aux motifs que le nombre de passages des films à la télévision (1.443) dépassait celui autorisé et qu’il n’avait pas été rémunéré au titre des autres modes d’exploitation. Le tribunal a ordonné une expertise en vue de chiffrer la rémunération due à l’acteur.

En appel, l’acteur demande le paiement des deux derniers tiers de la redevance forfaitaire (463.083 euros) ou qu’il lui soit versé, à titre de dommages et intérêts, la somme de 1.038.504 euros : 603.744 euros pour les 1.043 diffusions télévisées supplémentaires, 301.875 euros au titre de son préjudice moral et professionnel et respectivement 82.884 euros et 50.000 euros pour l’exploitation de sa prestation sur internet et sur des photographies. L’arrêt d’appel qualifie la convention de contrat conclu entre un artiste interprète et un producteur et décide qu’en dépassant le nombre de diffusions télévisées prévu, l’annonceur a violé une clause substantielle du contrat, ce qui, en application de celui-ci, entraîne sa résiliation de plein droit.

Les conséquences du dépassement du plafond de diffusion des publicités dépassent largement le montant des redevances que l’artiste-interprète aurait perçu jusqu’au terme du contrat, alors que celui-ci est résilié deux ans avant son échéance et que le préjudice résultant de la diffusion massive des publicités sur une courte durée est chiffré à 5 000 euros.

La décision relève que le contrat prévoit, en cas de résiliation, que l’acteur conserve les sommes versées et qu’il doit obtenir la réparation de son préjudice, et en conclut qu’il ne peut obtenir le paiement du solde de la redevance restant dû (463.083 euros). L’arrêt retient la demande d’indemnisation de l’acteur (603.744 euros) au titre des 1.043 diffusions télévisées non autorisées et non contestées par l’annonceur, chiffrée à partir de la rémunération unitaire découlant du contrat (694.624 euros pour 1.200 diffusions, soit 578,85 euros par diffusion). Il considère que l’absence de rémunération spécifique pour chacun des modes d’exploitation, contrevient à l’article L212-4 du Code de la propriété intellectuelle et chiffre le préjudice de l’artiste-interprète à 17.853 euros pour 5.951 visualisations des films sur le site internet de l’annonceur, 23.374 euros pour 23.374 visualisations sur le site Dailymotion, et 20.000 euros pour 303 affiches publicitaires. La décision évalue le préjudice moral de l’acteur, résultant de la diffusion massive des films sur une courte période, à 5.000 euros. L’arrêt ordonne à l’annonceur de communiquer son plan média pour fixer le préjudice lié à la publicité sur les lieux de vente. L’acteur obtient au total 679.971 euros de dommages et intérêts, soit une somme supérieure à ce qui lui restait à percevoir jusqu’à l’échéance du contrat (463.083 euros).

Le contrat entre un producteur et un artiste-interprète doit prévoir une rémunération pour chaque mode d’exploitation et le producteur doit solliciter l’autorisation de l’artiste-interprète pour toute exploitation non prévue.

CA Paris 16 10 2009 n° 09-14550

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