Apple Store ou la définition extensive de la marque…

Apple Store ou la définition extensive de la marqueA travers Apple Store, la société américaine Apple Inc. est connue pour la politique extensive de protection des marques. Connue pour sa politique extensive de protection de ses droits de propriété industrielle tant en matière de brevets – cf. la bataille judiciaire l’opposant à la société Samsung (1) – que de marques, la société américaine Apple Inc. vient de franchir un nouveau pas en obtenant la protection, à titre de marque, de ses boutiques Apple Store.

Titulaire de milliers de marques allant des classiques noms de ses produits – iphone, ipad, icloud, app store… – à leur moindre détails figuratifs – forme de bouton, icones, angles arrondis, etc., la société à la pomme vient en effet d’obtenir de l’USPTO (office américain des marques et brevets), l’enregistrement d’une marque figurative ayant pour objet de protéger « la conception et le design d’un magasin » (2).

La décision d’enregistrement a de quoi surprendre. En effet, si tout signe susceptible de représentation graphique est susceptible de constituer une marque, encore faut-il que ce signe soit apte à remplir sa fonction essentielle, à savoir permettre l’identification d’origine des produits et services visés.

Ainsi, si l’on s’en rapporte à sa définition française, « la marque de fabrique, de commerce ou de service est un signe susceptible de représentation graphique servant à distinguer les produits ou services d’une personne physique ou morale.
Peuvent notamment constituer un tel signe :

    a) Les dénominations sous toutes les formes telles que : mots, assemblages de mots, noms patronymiques et géographiques, pseudonymes, lettres, chiffres, sigles ;
    b) Les signes sonores tels que : sons, phrases musicales ;
    c) Les signes figuratifs tels que : dessins, étiquettes, cachets, lisières, reliefs, hologrammes, logos, images de synthèse ; les formes, notamment celles du produit ou de son conditionnement ou celles caractérisant un service ; les dispositions, combinaisons ou nuances de couleurs. »

C’est ainsi que, par un arrêt du 11 janvier 2000, la Cour de cassation avait rejeté le pourvoi formé contre l’arrêt prononçant la nullité d’une marque portant sur l’agencement d’une parfumerie, rappelant que « la protection à titre de marque de la forme caractéristique d’un bâtiment dans lequel on propose le service désigné au dépôt est légalement possible dès lors que cette forme est précise et arbitraire pour désigner le service en cause » et que tel n’est pas le cas du signe reproduisant « l’intérieur d’un magasin avec de très nombreux éléments, sans qu’on puisse déterminer lesquels d’entre eux seraient distinctifs pour désigner des services de conseils aux particuliers en matière de parfumerie » (3).

La notion de marque au sens du Lanham Trademark Act américain n’est pas différente. Si celui-ci n’exclut a priori aucun signe, encore faut-il que celui-ci soit susceptible de distinguer les produits du demandeur de la marque de ceux des tiers (4).

Ainsi, au sens du trademark Act, la marque de produit déposée (trademark) comme la marque de service (service mark) peut être constituée de tout mot, nom, symbole ou dispositif, ou toute combinaison de ceux-ci (utilisé par une personne ou qu’une personne entend utiliser dans le commerce) permettant d’identifier et de distinguer les produits ou services du demandeur de ceux des tiers, ainsi que d’en indiquer l’origine (5).

On peut dès lors s’interroger sur l’aptitude de la marque correspondant au concept store de la société Apple à constituer une marque valable pour identifier et distinguer les « services de magasin de vente au détail d’ordinateurs, de logiciels, de périphériques d’ordinateurs, de téléphones portables, de produits électroniques grand public ainsi que des services de démonstration des produits précités ».

La question est délicate, y compris pour l’Office américain des marques, qui n’a fait droit à la demande d’enregistrement qu’après deux refus successifs.

Si le signe désormais protégé fait l’objet d’une description particulièrement longue, celle-ci n’apparaît pas pour autant des plus précises et il y a fort à parier que la validité de cette marque donnera lieu à débat en cas d’action fondée sur cette dernière…

(1) Voir notre article du 12-10-2012
(2) Copie de la marque US85036990, 22-1-2013
(3) Cass. com. 11-1-2000 n° 97-19604
(4) Trademark Act, 15 USC § 1052.
(5) Trademark Act, 15 USC § 1127.

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