Blanchiment et financement du terrorisme, une nouvelle directive

Blanchiment et financement du terrorismeUne directive a été publiée le 19 juin 2018 dans la lutte contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme (1).

Alors que l’obligation de déclaration des «bénéficiaires effectifs» (Art.139 de la loi n° 2016-1691 du 9-12-2016.), instaurée par la loi Sapin 2 (2), pesant sur toutes les sociétés et entités juridiques établies sur le territoire français vient d’entrer en vigueur (3), le Conseil de l’Union européenne précise, dans un communiqué de presse que cette nouvelle directive, venant modifier la directive n° 2015/849 (4), vise à renforcer les règles de l’Union en matière de prévention du blanchiment de capitaux et du financement du terrorisme, avec le double objectif d’empêcher «la finance criminelle sans entraver le fonctionnement normal des systèmes de paiement» (5).

L’adoption de cette directive fait suite à un accord avec le Parlement européen conclu au mois de décembre 2017 (6).

Elargissement de l’accès à l’information sur les bénéficiaires effectifs

Les registres seront interconnectés pour faciliter la coopération entre les États membres. En outre, bien que l’objectif affiché soit la transparence, les conditions d’accès aux informations sur les bénéficiaires effectifs seront différentes selon la nature de l’information en cause.

Ainsi, cet accès sera :

  • public, s’agissant de celles concernant les entreprises ;
  • sur la base de «l’intérêt légitime», s’agissant de celles concernant les fiducies/trusts et constructions juridiques similaires ;
  • public et sur demande écrite, s’agissant de celles concernant les fiducies/trusts qui possèdent une entreprise non constituée dans l’UE.

Les États membres conserveront le droit de fournir un accès plus large aux informations, conformément à leur droit national.

Les autres mesures de la directive de lutte contre le financement du terrorisme

Les principales autres modifications de la directive 2015/849 sont les suivantes :

  • Traitement des risques liés aux cartes prépayées et aux monnaies virtuelles

Plus sûres que les espèces, la carte prépayée est une carte de paiement rechargeable par son titulaire et dont le solde est vérifié à chaque achat ou retrait.

Ces cartes, qui ne peuvent pas être débitrices, sont très accessibles car elles peuvent ne pas nécessiter l’ouverture d’un compte bancaire et la communication, par son titulaire, d’informations en découlant.

Avec cette nouvelle directive, le seuil à partir duquel les titulaires de cartes prépayées devront être identifiés est ramené de 250 à 150 euros.

En outre, «les plateformes de change de monnaies virtuelles et les fournisseurs de portefeuilles de stockage devront appliquer des mesures de vigilance à l’égard de la clientèle, mettant un terme à l’anonymat associé à ce type d’échanges».

  • Renforcement de la coopération entre les cellules de renseignement financier (CRF) des États membres

Le texte prévoit que les CRF auront accès aux registres centralisés des comptes bancaires et des comptes de paiement, pour permettre d’identifier les titulaires de compte.

  • Amélioration des contrôles sur les transactions impliquant des pays tiers à haut risque

Pour mémoire, «la Commission a créé et actualise régulièrement une liste harmonisée des pays tiers dont les régimes de prévention du blanchiment de capitaux présentent des carences».

A cet égard, le Code monétaire et financier prévoit que «un décret en Conseil d’Etat peut, pour des motifs d’ordre public, soumettre à des conditions spécifiques, restreindre ou interdire tout ou partie des opérations réalisées (…) avec des personnes physiques ou morales, y compris leurs filiales ou établissements, domiciliées, enregistrées ou établies dans l’un des Etats ou territoires figurant sur» notamment cette liste (CMF article L.561-11).

«Des mesures de vigilance supplémentaires seront nécessaires pour les flux financiers provenant de ces pays».

Il convient donc d’être d’autant plus vigilant, notamment dans le cadre des opérations de levée de fonds des entreprises.

Carine Dos Santos
Lexing pôle Droit de l’entreprise

(1) Directive (UE) 2018/843 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 modifiant la directive (UE) 2015/849 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme ainsi que les directives 2009/138/CE et 2013/36/UE (JOUE L 156 du 19-06-2018, p. 43–74).
(2) Loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique
(3) Sur les conditions et les formalités à accomplir : Infogreffe.
(4) Directive (UE) 2015/849 du Parlement Européen et du Conseil du 20 mai 2015 relative à la prévention de l’utilisation du système financier aux fins du blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, modifiant le règlement (UE) n° 648/2012 du Parlement européen et du Conseil et abrogeant la directive 2005/60/CE du Parlement européen et du Conseil et la directive 2006/70/CE de la Commission
(5) Communiquée de presse du Conseil de l’UE du 14 mai 2018.
(6) Communiqué de presse du Conseil de l’UE du 20 décembre 2017.

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