Technologie blockchain : entretien avec Charles du Boullay

Technologie blockchain : entretien avec Charles du Boullay

La blockchain est incontournable au point que d’aucuns la qualifient de plus grande révolution depuis internet.

Charles du Boullay président de CDC ArkhinéoDécryptage avec Charles du Boullay, président de CDC Arkhinéo (groupe Caisse des dépôts). Propos recueillis par Polyanna Bigle.

Parle-t-on de la ou des blockchain(s) ?

Aujourd’hui on peut parler des Blockchains car de nombreux acteurs publics et privés ont lancé des expérimentations sur l’utilisation de la technologie blockchain pour d’autres cas que la monnaie virtuelle.

La première blockchain est apparue en 2008 avec la monnaie numérique bitcoin, son principe repose sur un chaînage des traces des échanges.

La technologie blockchain permet de constituer une base de données (Chain) transparente, sécurisée qui contient l’historique de tous les échanges effectués entre ses utilisateurs depuis sa création. Cette base de données est sécurisée et distribuée : elle est partagée par ses différents utilisateurs, sans intermédiaire, ce qui permet à chacun de vérifier la validité de la chaîne. Elle fonctionne sans organe central de contrôle.

Une blockchain publique peut donc être assimilée à un grand livre comptable public, anonyme et infalsifiable. Tout le monde peut potentiellement le consulter librement et gratuitement, sans pouvoir le détruire.

Comment ça marche ?

A ce jour, toutes les blockchains publiques fonctionnent nécessairement avec une monnaie. Bitcoin est la première et la plus importante.

Les transactions effectuées entre les utilisateurs du réseau sont regroupées par blocs. Chaque bloc est créé, puis validé par les noeuds du réseau appelés les “mineurs”, selon des techniques qui dépendent du type de blockchain. Dans la blockchain du bitcoin, cette technique est appelée le “Proof-of-Work”, preuve de travail, et consiste en la résolution d’un problème algorithmique.

Le bloc créé est daté. Une fois validé, il est ajouté à la chaîne de blocs et les transactions sont alors visibles pour l’ensemble du réseau.

Pour la blockchain bitcoin, la complexité du problème algorithmique s’adapte pour que ce processus prenne une dizaine de minutes. Cette technologie/service, si elle est prometteuse, n’est pas encore mature et ne le sera pas avant 3-5 ans.

Arkhinéo a-t-elle recours à cette technologie ? Si oui dans quels domaines ?

CDC Arkhinéo a adopté le principe d’un chaînage des archives dès 2007, avant l’arrivée de la technologie BlockChain/Bitcoin. Chaque client dispose d’une chaîne de ses archives. Cela lui permet d’avoir l’assurance qu’aucune archive ne pourra être détruite, remplacée ou qu’aucune archive ne serait insérée à son insu. Cela permet également pour chacun de nos clients, au-delà de l’intégrité de chaque archive qu’il nous confie (sur laquelle nous nous engageons), de garantir l’intégrité de toute la chaîne de ses archives. De même, la totalité des journaux et des données de configuration est conservée sous forme de chaînes dédiées.

Nous sommes dans le cas d’une Blockchain « privée », sauf que CDC Arkhinéo ne se limite pas à conserver la trace des échanges comme dans le cas de la technologie Blockchain mais conserve aussi les « documents » eux-mêmes.

Quels sont les enjeux notamment juridiques liés à l’utilisation de cette technologie ?

Cette question pourrait permettre de présenter les axes de réflexion autour de la blockchain, les secteurs dans lesquels cette technologie n’est pas encore utilisée mais pourrait l’être, etc.

Nous sommes sur un marché émergeant en ce qui concerne la Blockchain. Comme pour tout nouveau marché, il faut 3 éléments : une technologie pertinente, un modèle économique/usage et un environnement juridique qui permette de reconnaître le service rendu et n’expose pas l’entreprise utilisatrice à des risques juridiques :

  • la technologie : si elle n’est pas encore mature on peut imaginer qu’elle le sera à court terme ;
  • le modèle économique/usage : il reste à définir mais là aussi, à partir du moment où un service rendu est pertinent, il mérite rémunération, donc le modèle économique ne devrait pas poser de problème ;
  • l’environnement juridique : si, dans le cadre d’une Blockchain privée, il sera possible de fixer les responsabilités de chacune des entreprises utilisatrices, cela ne sera pas possible dans le cadre d’une Blockchain publique. Le grand intérêt de la blockchain repose sur le fait qu’elle soit publique, or l’avantage économique n’est prouvé que sur l’usage de blockchains privées pour répondre à des besoins de certains secteurs d’activité (il existe quelques exemples parlants dans le secteur financier). Le chantier est donc ouvert….

Polyanna Bigle
Lexing Droit Sécurité des systèmes d’information

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