Conditions de la constitution de partie civile d’une association

Conditions de la constitution de partie civile d’une associationLa présence d’un préjudice indirect ne permet pas à elle seule la constitution de partie civile d’une association.

En l’espèce, une association ayant pour objet la “défense des contribuables de Levallois-Perret face aux pouvoirs publics, qu’ils soient nationaux, régionaux, départementaux ou municipaux”, s’était constituée partie civile dans le cadre d’une information.

Dans le cadre de cette information, le maire de cette municipalité et son épouse étaient mis en examen pour le premier, des chefs de blanchiment de fraude fiscale, de corruption passive, de blanchiment de corruption et de non-déclaration d’une partie substantielle de son patrimoine à la Haute autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP), et, pour la seconde, des chefs de blanchiment de fraude fiscale et de non-déclaration d’une partie substantielle de son patrimoine à la HATVP.

Le juge d’instruction avait déclaré cette constitution de partie civile recevable, considérant que l’association avait subi un préjudice direct et personnel. La Cour d’appel de Paris avait confirmé cette ordonnance.

La Cour de cassation a, par un arrêt du 11 octobre 2017 (1), cassé cet arrêt, considérant que l’association ne justifiait pas d’un préjudice direct et personnel et ne remplissait pas les conditions prévues par les dispositions de l’article 2-23 du Code de procédure pénale.

Cadre de la constitution de partie civile d’une association

L’article 85 du Code de procédure pénale prévoit que pour qu’une constitution de partie civile soit recevable devant la juridiction d’instruction, il suffit que les circonstances sur lesquelles elle s’appuie permettent d’admettre comme possibles l’existence du préjudice allégué et la relation directe de celui-ci avec une infraction à la loi pénale.

Les associations déclarées auprès de la Préfecture sont des personnes morales. En application de l’article 6 de la Loi du 1er juillet 1901, elles peuvent « sans aucune autorisation spéciale, ester en justice ».

Ainsi, dès lors qu’elles ne justifient pas d’un préjudice personnel et direct elles ne peuvent agir en justice pour défendre un intérêt collectif, sauf à relever d’un texte autorisant cette action.

L’article 2-23 du Code de procédure pénale prévoit ainsi que :

« Toute association agréée déclarée depuis au moins cinq ans à la date de la constitution de partie civile, se proposant par ses statuts de lutter contre la corruption, peut exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne les infractions suivantes :
1° Les infractions traduisant un manquement au devoir de probité, réprimées aux articles 432-10 à 432-15 du code pénal ;
2° Les infractions de corruption et trafic d’influence, réprimées aux articles 433-1, 433-2, 434-9, 434-9-1, 435-1 à 435-10 et 445-1 à 445-2-1 du même code ;
3° Les infractions de recel ou de blanchiment, réprimées aux articles 321-1, 321-2, 324-1 et 324-2 dudit code, du produit, des revenus ou des choses provenant des infractions mentionnées aux 1° et 2° du présent article ;
4° Les infractions réprimées aux articles L. 106 à L. 109 du code électoral.
Un décret en Conseil d’Etat fixe les conditions dans lesquelles les associations mentionnées au premier alinéa du présent article peuvent être agréées.
Toute fondation reconnue d’utilité publique peut exercer les droits reconnus à la partie civile dans les mêmes conditions et sous les mêmes réserves que l’association mentionnée au présent article ».

L’association en question ne remplissant pas ces conditions.

Irrecevabilité de la constitution de partie civile de l’association

La chambre de l’instruction a toutefois reconnu l’intérêt à agir de l’association dans la mesure où, en raison « de la spécificité, du but et de l’objet de sa mission », il a été considéré que les faits visés lui avaient causé un préjudice personnel et direct.

Elle avait, en ce sens, suivi la jurisprudence de la Cour de cassation dite des « biens mal acquis » (2).

La Cour de cassation a néanmoins cassé la décision des juges de la Cour d’appel de Paris, considérant que : « d’une part, ainsi que le relève la chambre de l’instruction, n’était ni agréée ni déclarée depuis au moins cinq ans à la date de sa constitution de partie civile, d’autre part, ne justifie pas d’un préjudice personnel directement causé par les délits poursuivis de blanchiment de fraude fiscale, corruption et blanchiment de corruption, la chambre de l’instruction a méconnu les textes visés au moyen ».

Chloé Legris
Raphaël Liotier
Lexing Contentieux numérique

(1) Cass. crim. 11-10-2017, n°16-86868.
(2) Cass. crim. , 9-11-2010, n° 09-88.272, Inédit

Retour en haut