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Confirmation de la condamnation de Microsoft

Après 10 ans de procédure, la décision de condamnation de la Commission de mars 2004 vient d’être confirmée, le 17 septembre 2007, par le Tribunal de première instance des communautés européennes. Le Tribunal a en effet rejeté le recours engagé par Microsoft à l’encontre de la décision de la Commission du 24 mars 2004, qui l’avait condamnée à une amende record de 497 millions d’euros pour abus de position dominante. L’arrêt vient avaliser la position emblématique prise par la Commission sur l’interdiction de lier à l’avenir la vente du logiciel Windows Media Player avec le système d’exploitation Windows 2000. Mais c’est surtout la question de l’interopérabilité des systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail avec l’environnement Windows qui intéressera les professionnels de l’informatique.

Presque tous les arguments de Microsoft, qui peut encore exercer un recours devant la Cour de justice des Communautés européennes, ont été rejetés, les uns après les autres, par les 1373 paragraphes de l’arrêt, y-compris sur le montant de l’amende prononcée par la Commission. La décision repose principalement sur la position ultra dominante de Microsoft – plus de 90 % – sur le marché des systèmes d’exploitation pour PC, qui présente, selon la Commission et le tribunal, des « caractéristiques extraordinaires ». A tel point que Windows représente la « norme de fait » pour ces systèmes d’exploitation. A ce titre, il est reproché à Microsoft d’avoir cherché à bénéficier de l’effet de levier de sa position pour écarter ses concurrents, tant sur le marché des systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail, que sur celui des lecteurs multimédia.

L’enjeu de l’interopérabilité

Le premier volet de l’affaire concerne l’interopérabilité entre les systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail et l’environnement Windows 2000. Une plainte du constructeur Sun, en 1998, est à l’origine de l’affaire, parallèlement à une plainte engagée aux Etats-Unis. Sun cherchait en effet, sans succès, à obtenir auprès de Microsoft l’accès aux informations nécessaires à l’interopérabilité de ses serveurs avec les systèmes d’exploitation Windows. La Commission a, dans sa décision de mars 2004, enjoint à Microsoft de divulguer ces informations à toute entreprise souhaitant développer et distribuer des systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail. L’interopérabilité requise était très large, puisqu’elle concernait tant les relations serveur-client que les relations serveur-serveur, les systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail concurrents devant être en mesure de « participer à l’architecture de domaine Windows sur un pied d’égalité » avec les systèmes d’exploitation Windows pour serveurs de groupe de travail.

Le degré élevé d’interopérabilité requis par la Commission faisait notamment l’objet du re-cours de Microsoft. Cette dernière invoquait le secret des affaires et des droits de propriété intellectuelle qu’elle détiendrait sur les éléments d’interopérabilité demandés. La jurispru-dence communautaire n’accepte en effet d’imposer l’octroi d’une licence « forcée » que dans des « circonstance exceptionnelles », qui selon Microsoft n’auraient pas été réunies. Le tribunal a écarté les arguments de Microsoft, en considérant que les informations relatives à l’interopérabilité sont indispensables à la viabilité même des systèmes d’exploitation pour serveurs de groupe de travail concurrents des systèmes Windows, compte tenu notamment du rôle clé de l’interopérabilité avec l’environnement Windows dans l’adoption des systèmes d’exploitation, quels que soient les mérites des systèmes concurrents.

Les lecteurs multimédia

L’autre volet de l’affaire, beaucoup plus médiatisé, est celui de la vente liée du système d’exploitation Windows 2000 et du lecteur multimédia Windows Media Player, qui a conduit à l’omniprésence de ce lecteur, « préinstallé » sur 90 % des postes PC vendus dans le monde. Le tribunal s’attache ainsi à l’absence de choix pour les consommateurs d’obtenir le système d’exploitation Windows 2000 sans le lecteur Windows Media Player, notamment parce que les licences de distribution du système d’exploitation consenties aux équipementiers comprennent nécessairement le lecteur multimédia, qu’il n’est en outre pas possible de désinstaller. Il écarte ainsi les arguments de Microsoft relatifs à la possibilité de télécharger d’autres lecteurs. Plus graves sont, selon le tribunal, les effets de cette pratique : la pratique a eu un effet d’exclusion des concurrents, en réduisant l’apparition d’innovations technologiques. Micro-soft a en outre pu étendre son emprise sur les marchés adjacents des fournisseurs de contenus, et concepteurs de logiciels, qui ont été incités à axer leurs développements pour Windows Media Player.

Le débat est aujourd’hui toujours d’actualité puisque l’environnement Windows (Windows 2000 suivi de Windows XP et de Windows Vista) reste aujourd’hui une norme. Le débat sur l’interopérabilité et sur les lecteurs multimédia continuera probablement à alimenter les chroniques de droit de la concurrence.

TPICE, 17 septembre 2007

(Mise en ligne Septembre 2007)

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