Conformité du logiciel de suivi des pilotes à la loi de 1978

logiciel de suivi des pilotesLa Cour de cassation se prononce sur la conformité du logiciel de suivi des pilotes d’Air France à la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés (1).

Depuis 2005, la société Air France dispose d’un outil informatique aujourd’hui dénommé « Fidèle », déclaré auprès de la Cnil. Le rôle de ce logiciel de suivi des pilotes, est d’encadrer les personnels navigants techniques en permettant un suivi de l’activité journalière et un passage de consignes entre les cadres de permanence des sites de Roissy et d’Orly, aujourd’hui étendu à l’ensemble de la flotte.

Suite à une plainte du Syndicat des Pilotes d’Air France (SPAF) en 2014, une procédure de contrôle de l’application a été menée par la Cnil et fut clôturée le 18 juillet 2014 car la société Air France s’était conformée aux exigences de cette dernière.

Le 15 mai 2014, le SPAF a saisi le juge des référés pour demander la nullité de conformité à l’application de la loi de 1978 par la société Air France puis a fait appel de la décision de rejet.

Le 29 juin 2016, la Cour d’appel de Paris a débouté le SPAF de ses demandes.

La SPAF s’est pourvue en cassation contre cet arrêt pour obtenir que la société Air France cesse l’utilisation de l’application et ainsi cesse de collecter et traiter des données à caractère personnel des pilotes par le biais de cette application.

Le respect du principe de collecte loyale des données à caractère personnel

La Cour de cassation a, dans un premier temps, rappelé que l’article 6, 1° de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978 prévoit que les données personnelles doivent être collectées et traitées de manière loyale et licite.

En l’espèce, les pilotes ont été informés préalablement de l’existence de ce traitement automatisé de leurs données personnelles ainsi que des modalités d’exercice de leurs droits concernant l’accès, la rectification et la suppression de leurs données à caractère personnel.

Les personnes concernées par le traitement de leurs données personnelles peuvent, par le biais d’un mémo circularisé sous forme papier et quand ils le souhaitent, accéder à l’évènement et ensuite ajouter leurs commentaires.

Dispositions propres aux données à caractère personnel

La Cour de cassation a, ensuite, constaté que les indications relatives aux arrêts de travail, en ne faisaient pas apparaître le motif de l’absence, ne sont pas considérées comme des données personnelles relatives à l’état de santé santé de la personne concernée, sur le fondement de l’article 8 de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978.

Elle a pu, aussi en déduire, au sens de l’article 8, que l’application n’offrait pas la possibilité de collecter des données personnelles illicites.

La finalité principale du logiciel de suivi des pilotes

La Cour de cassation a, dans un dernier temps, observé que l’application avait comme ultime rôle d’assurer un suivi entre les personnels navigants techniques (PNT) et les managers permettant l’exploitation de la flotte et la gestion des emplois du temps.

Elle a aussi pu noter que seul l’évènement lié à l’exploitation de la flotte était inscrit sur l’application et non les conséquences disciplinaires adoptées qui font l’objet d’un traitement distinct par un autre service.

Elle a, ensuite, pu apprécier que le service des ressources humaines n’utilisait pas l’application mais d’autres applications spécialement dédiées au domaine. L’application en cause ne comportant aucune donnée portant sur d’éventuelles sanctions, dès lors, elle ne peut être rattachée à la direction des dossiers professionnels des pilotes notamment pour la prise de décisions dans le déroulement de leur carrière.

Ainsi, la Cour de cassation, sur le fondement de l’article 6, 2° de la loi n°78-17 du 6 janvier 1978, a constaté et déduit que les deux cas d’utilisation de données issues de l’application litigieuse dénoncés par le SPAF comme fautifs n’étant pas à eux seuls suffisants à démontrer l’illicéité de l’application et constaté l’absence de détournement de la finalité déclarée de l’application à des fins de gestion illicite du personnel.

Par conséquent, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi formé par le SPAF aux fins de faire déclarer l’absence de conformité de l’application « Fidèle » aux dispositions de la loi n° 78-17 du 6 janvier 1978 relative à l’informatique, aux fichiers et aux libertés. .

Virginie Bensoussan-Brulé
Debora Cohen
Lexing Contentieux numérique

(1) Cass. soc., 13 juin 2018, n° 16-25.301.

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