Le cyberharcèlement, trouble manifestement illicite

Le cyberharcèlement : trouble manifestement illiciteLe cyberharcèlement est constitutif d’un trouble manifestement illicite justifiant une demande en référé.

L’article 222-33-2-2 du Code pénal, intégré dans le Code pénal par la loi du 4 août 2014 pour l’égalité réelle entre les femmes et les hommes (1), a instauré l’infraction de cyberharcèlement en prévoyant que :

« le fait de harceler une personne par des propos ou comportements répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de vie se traduisant par une altération de sa santé physique ou mentale est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende lorsque ces faits ont causé une incapacité totale de travail inférieure ou égale à huit jours ou n’ont entraîné aucune incapacité de travail ». Les peines sont portées à deux ans d’emprisonnement et à 30.000 euros d’amende notamment si les faits « ont été commis par l’utilisation d’un service de communication au public en ligne ».

Rencontrant des difficultés par rapport à la garde de ses enfants une femme avait pris contact avec un association. Les relations avec le président de l’association se sont dégradées et ce dernier avait publié 34 articles ternissant sa réputation et celle de son époux à partir du mois d’avril 2012 et jusque pendant l’instance.

Une infraction pénale étant également constitutive d’une faute civile pouvant générer des actions devant les juridictions civiles, la victime de cyberharcèlement et son époux l’avaient alors assigné en référé, sur le fondement de l’article 809 du Code de procédure civile, se fondant sur le trouble manifestement illicite que lui causaient les 34 publications litigieuses.

Par une ordonnance de référé du 29 mars 2016, le Président du Tribunal de grande instance de Paris a ordonné à leur auteur, sous astreinte de de 100 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours suivant la signification de l’ordonnance, de retirer les articles litigieux.

Le Président du tribunal a en effet considéré que le trouble manifestement illicite, résultat de la commission de l’infraction de cyberharcèlement prévue à l’article 222-33-2-2 du Code pénal était caractérisé par :

  • le fait que le demandeur avait démontré « la nocivité de ces articles sur sa vie personnelle produisant, à l’appui de ses affirmations, un certificat médical justifiant de soins qu’il doit recevoir, et expliqué que sa femme rencontrait également des difficultés du fait de ces très nombreuses publication » ;
  • le nombre et de la teneur des articles ;
  • l’absence de justification du défendeur sur ce comportement.

Ce nouveau délit de cyberharcèlement, évoqué dans les travaux parlementaires pour lutter contre les comportements des collégiens, lycéens et étudiants notamment les pratiques dites de « happy slapping » ou de « slut shaming », trouve ici une application plus large, qui permet de réprimer des comportements qui ne pouvaient faire l’objet d’une appréhension par le droit pénal.

Virginie Bensoussan-Brulé
Chloé Legris
Lexing Contentieux numérique

(1) Loi n°2014-873 du 4-8-2014, art. 41.

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