Délit d’outrage : aggravation des peines et qualification en question

Délit d’outrage

L’aggravation des peines prévues pour le délit d’outrage est l’occasion de revenir sur les critères de qualification.

La loi n°2017-258 du 28 février 2017 relative à la sécurité publique (1) aggravant les peines prévues à l’article 433-5 du Code pénal permet de revenir sur les critères de qualification du délit d’outrage et la distinction à opérer avec les délits de diffamation et d’injure.

Aggravation des peines prévues par l’article 433-5 du Code pénal relatif au délit d’outrage

Le texte conserve la définition de l’outrage en son alinéa 1er visant ainsi « les paroles, gestes ou menaces, les écrits ou images de toute nature non rendus publics ou l’envoi d’objets quelconques adressés à une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission, et de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie ».

Il prévoit désormais que le délit d’outrage est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende, au lieu de 7 500 euros précédemment, lorsqu’il est adressé à une personne dépositaire de l’autorité publique.

Lorsqu’il est commis en réunion, le délit d’outrage tel que défini à l’alinéa 1er est puni de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende au lieu de 15 000 euros précédemment.

Retour sur les éléments constitutifs du délit d’outrage et de distinction avec la diffamation et de l’injure

Le délit d’outrage prévu et réprimé à l’article 433-5 du Code pénal suppose la réunion de quatre éléments, à savoir (i) des propos, écrits, gestes ou menaces non rendus publics ; (ii) à l’égard d’une personne chargée d’une mission de service public, dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission ; (iii) de nature à porter atteinte à sa dignité ou au respect dû à la fonction dont elle est investie et (iv) la conscience d’outrager.

La jurisprudence récente sur le sujet apporte un éclairage sur ces éléments et permet d’opérer une distinction plus ou moins nette avec la diffamation et l’injure.

  • Un critère de publicité non déterminant pour la qualification de l’infraction

Les éléments outrageants que ce soit propos, écrits, gestes ou menaces doivent a priori être non rendus publics. Cette condition semblerait donc être exclusive de toute publicité contrairement à la diffamation ou à l’injure publiques. Cependant, la distinction n’est pas toujours aussi binaire en pratique.

Un récent arrêt de la Cour de cassation du 29 mars 2017 (2) apporte des éléments de réponse en rappelant que l’infraction d‘outrage n’est caractérisée que lorsque le destinataire des propos est effectivement atteint par ceux-ci. Au cas d’espèce, la qualification du délit d’outrage n’a pas été retenue. L’élément intentionnel comprendrait non seulement (i) l’intention d’employer des termes outrageants mais aussi (ii) l’intention d’atteindre effectivement le destinataire peu important le caractère public ou non des propos outrageants.

Le critère de la publicité n’est donc plus un élément déterminant de la qualification de délit d’outrage.

  • Une différenciation par les valeurs protégées par l’infraction

Le choix de qualification entre outrage, diffamation et injure est parfois délicat notamment en ce que l’outrage recouvre des propos diffamatoires ou injurieux. Les valeurs sociales protégées par chacune des infractions peuvent être un élément de différenciation.

L’article 433-5 du Code pénal relatif au délit d’outrage est relatif à la dignité de la personne et au respect de la fonction dont elle est investie. En effet, le texte vise « toute personne chargée d’une mission de service public dans l’exercice ou à l’occasion de l’exercice de sa mission ». Le texte réprimant les atteintes à la dignité d’une personne chargée d’une mission de service public se distingue donc des valeurs que sont l’honneur et la considération protégées par la loi de 1881 sur la presse.

Dans une récente décision du 29 mars 2017 (3), la Cour de cassation rappelle que le respect de la dignité demeure une valeur protégée en droit interne sans incompatibilité avec le droit européen. En l’espèce, les propos ont été jugés outrageants de nature à porter atteinte à la dignité des agents publics concernés et au respect dû à leurs fonctions et n’entrant pas en conséquence dans le champ d’application de l’article 10§1 de la Convention européenne des droits de l’homme relatif à la liberté d’expression.

Par ailleurs, l’article 433-5 du Code pénal relatif au délit d’outrage est un texte de droit commun ; là, où les infractions de diffamation et d’injure sont contenues dans un texte de droit spécial, la loi sur la presse de 1881. Cette différence a un impact en termes de règles de fond et de forme plus ou moins rigides.

Conclusion

Le choix est donc subtil et pourra se faire au cas par cas en fonction notamment de la personne visée, de la nature des propos tenus et en référence aux valeurs sociales atteintes.

Lexing Alain Bensoussan Avocats
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(1) La loi n° 2017-258 du 28-2-2017 relative à la sécurité publique.
(2) Cass. crim., 29-3-2017, n° 16-82884, Publié au bulletin.
(3) Cass. crim., 29-3-2017, n° 16-80637, Publié au bulletin.

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