Economie jurdique-JP38

Economie juridique

Difficultés d’appréciation des dommages sur internet


Nouvelle affaire de liens commerciaux sur un moteur de recherche

Après la décision du TGI de Nanterre du 17 janvier 2005 (2) ayant condamné Overture pour contrefaçon, à l’occasion de la vente de liens promotionnels (voir JTIT n°37), le TGI de Paris a rendu une décision relative à des faits similaires, dont la comparaison avec la précédente est intéressante sur le plan de l’indemnisation des dommages (1).

Comme dans l’affaire précitée, Google commercialise des mots clés auprès d’annonceurs, sans contrôler les droits dont ils disposent, pour qu’un lien vers leur site apparaisse en bonne position dans les pages de résultats fournies aux internautes, lorsque ces mots clés sont recherchés.

Parmi les mots clés proposés à la vente par Google, la société Louis Vuitton Malletier a constaté que figuraient plusieurs de ses marques, souvent associées à des termes tels que « copie », « imitation ». Ainsi, un internaute recherchant les termes « copie Vuitton » pouvait accéder directement à des sites proposant des produits contrefaisants.

L’enjeu

Alors que les affaires de contrefaçon et de concurrence déloyale sur internet se multiplient, les victimes et les tribunaux ont encore des difficultés pour en apprécier précisément toutes les conséquences.


Evaluation forfaitaire des demandes et de la réparation accordée

Vuitton ayant assigné Google pour contrefaçon de marques, atteinte à sa dénomination sociale, à son enseigne, à son site internet et pour publicité trompeuse, le tribunal retient la totalité des griefs invoqués.

Alors que le groupe Accor avait demandé à l’encontre d’Overture une réparation de 46 millions d’euros, Vuitton a évalué à 150 000 euros le préjudice résultant de la contrefaçon et à 150 000 euros celui résultant des actes de concurrence déloyale et de publicité trompeuse.

Le jugement apprécie cette demande en relevant la durée des faits litigieux (6 mois), la notoriété des marques en cause, « l’importance » du site internet de Vuitton et les sommes « élevées » (non citées) investies pour la promotion de ses marques. Il lui accorde la même réparation qu’au groupe Accor, soit 200 000 euros au total.

Comme dans la décision Accor, les préjudices invoqués semblent évalués sans justification quantitative. Vuitton obtient les deux tiers de la somme demandée, là où Accor avait obtenu moins de 2% de sa demande au titre de la seule contrefaçon. Les faits apparaissent plus graves en l’espèce (liens vers des sites contrefaisants) et la responsabilité de Google est retenue à plusieurs titres.

Les dommages subis auraient mérités d’être évalués et appréciés à partir de données chiffrées : chiffre d’affaires réalisé par Google à partir des mots clés litigieux, nombre de clics enregistrés, dépenses à engager pour rétablir l’image de Vuitton.

Les conseils

Les outils de mesure et d’analyse d’audience des sites web peuvent pourtant fournir des informations précises pour estimer l’impact des faits constatés sur le public.Associées aux données comptables, ces informations peuvent justifier les dommages causés et améliorer les chances de réparation.

Notes

(1) TGI Paris, 3ème ch. 04/02/2005, Louis Vuitton Malletier c. Google Inc et Google France
(2) TGI Nanterre 17/01/2005, Accor c. Overture

Paru dans la JTIT n°38/2005 p.8

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