Hadopi : condamnation pour absence de sécurisation de l’accès

hadopiLe 3 juin 2013, le Tribunal de police de Montreuil a fait application des lois Hadopi en prononçant, à l’encontre du titulaire d’un abonnement internet, une condamnation au titre de la négligence caractérisée prévue et sanctionnée par l’article R. 335-5 du Code de la propriété intellectuelle, à savoir l’absence de sécurisation de sa ligne internet (1).

Le prévenu a été condamné à une amende de 600 euros et à une coupure de son accès à internet (service de communication au public en ligne) pendant une durée de 15 jours.

Le jugement, rendu par défaut, ne précise ni la nature des atteintes aux droits commises grâce à l’accès internet de cet utilisateur négligent, ni les conditions dans lesquelles a été mise en œuvre la procédure de riposte graduée Hadopi, préalable non judiciaire à une action judiciaire.

Négligence caractérisée : Le titulaire de l’accès à des services de communication au public en ligne qui manque de diligence à l’égard de l’utilisation qui est faite à partir de son accès, ou qui ne met pas en place les moyens de sécurisation appropriés, s’expose à une contravention pour négligence caractérisée, soit à une amende prévue pour les contraventions de 5e classe, à savoir à une amende de 1 500 euros et à la peine complémentaire de suspension de son accès aux services. Cette sanction intervient après la mise en œuvre de la procédure de riposte graduée, importée dans le Code de la propriété intellectuelle par les lois Hadopi.

Procédure de riposte graduée : Cette procédure est préventive et intervient avant la mise en œuvre d’une procédure judiciaire. En effet, lorsqu’elle est saisie de faits susceptibles de constituer une négligence caractérisée (au sens de la loi Hadopi) dans l’obligation de surveillance qui s’impose à l’abonné, la Commission de protection des droits (CPD) issue des lois Hadopi, peut adresser à ce dernier une recommandation lui rappelant ses obligations et les sanctions encourues. La loi Hadopi prévoit expressément que « cette recommandation contient également une information de l’abonné sur l’offre légale de contenus culturels en ligne, sur l’existence de moyens de sécurisation permettant de prévenir les manquements à l’obligation définie à l’article L. 336-3 ainsi que sur les dangers pour le renouvellement de la création artistique et pour l’économie du secteur culturel des pratiques ne respectant pas le droit d’auteur et les droits voisins ». Si l’abonné renouvelle ses manquements à l’obligation de surveillance dans un délai de six mois à compter de la notification de la recommandation, la Commission peut adresser une nouvelle recommandation, selon les mêmes modalités et le même contenu que la première. En outre, la deuxième recommandation doit être assortie d’une lettre contre signature ou de tout autre moyen rapportant la preuve de la date de sa présentation. La troisième notification n’intervient qu’en cas d’absence de mise en conformité suite aux deux précédentes notifications adressées par la Commission de protection des droits .

En cas d’échec de la phase non judiciaire, la CDP transmet le dossier au Parquet. S’agissant de contraventions de 5e classe, le Tribunal de police est compétent pour connaître des faits de négligence caractérisée.

Conséquence : Le jugement ayant été rendu par défaut en premier ressort, il appartiendra à la CDP, une fois les délais de recours expirés, d’informer le fournisseur d’accès internet de la peine de suspension prononcée, en application de l’article R. 331-46 du Code de la propriété intellectuelle et l’opérateur devra bloquer l’accès pendant la durée arrêté par le tribunal.

L’article L. 335-7-1 du Code de la propriété intellectuelle, qui instaure la peine complémentaire de suspension à l’accès internet en cas de négligence caractérisée, ne prévoit pas de sanction pour le fournisseur d’accès défaillant, au contraire de l’article L. 335-7 applicable à la suspension suite à des actes de contrefaçon qui prévoit une amende de nature délictuelle de 5 000 euros. La question se posera donc de savoir si la sanction du fournisseur d’accès qui « ne [mettrait pas] en œuvre la peine de suspension qui lui a été notifiée » prévue à l’article L. 335-7 s’applique ou non à cette seconde hypothèse. Si tel est le cas, à défaut de suspension de l’accès internet, le fournisseur d’accès s’exposera lui-même à des poursuites pénales au titre des lois Hadopi.

Marie Soulez
Lexing Contentieux Propriété intellectuelle

(1) TP Montreuil, 3-6-2013, parquet n°12053081381.

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