Une loi favorise les modes alternatifs de règlement des différends

modes alternatifs de règlement des différends

De nouvelles dispositions, destinées à favoriser les modes alternatifs de règlement des différends, ont été introduites par le titre II de la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 (1).

1. Le renforcement de la tentative préalable de conciliation

Sous l’ancienne rédaction du Code de procédure civile, le justiciable devait préciser dans son assignation les diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable du litige dont la sanction était simplement la possibilité pour le juge de proposer une mesure de conciliation ou de médiation (2).

Aux termes de l’article 4 de la loi, en l’absence de tentative de conciliation menée par un conciliateur de justice, le juge peut prononcer d’office l’irrecevabilité.

Cette apparente rigueur doit cependant être adoucie puisque :

  • ce principe ne concerne que les procédures devant le tribunal d’instance (donc pour les demandes de moins de 4.000 euros) ;
  • ce principe est accompagné de trois exceptions :
  • si l’une des parties au moins sollicite l’homologation d’un accord ;
  • si les parties justifient d’autres diligences entreprises ;
  • et si l’absence de recours à la conciliation est justifiée par un motif légitime.

Cette troisième exception, catégorie « fourre-tout », atténue considérablement la portée du principe précité.

2. La médiation

Toujours en matière de règlement des différends, la loi du 18 novembre 2016 insère deux chapitres consacrés à la médiation dans le Code de justice administrative créant ainsi l’article L.114-1 pour le Conseil d’État et les articles L.213-1 et suivants concernant les tribunaux administratifs et les cours administratives d’appel.

La médiation est tout d’abord définie comme :

« tout processus structuré, quelle qu’en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l’aide d’un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par la juridiction ».

Sur le plan juridique, cette définition n’emporte pas de conséquences par rapport à l’ancienne définition.

Ce mode de règlement des différends est ensuite explicité, selon qu’elle est initiée par le juge ou par les parties, et les développements concernent particulièrement la fixation ou non d’une rémunération et son montant.

Dans les deux cas, si le médiateur retenu n’appartient pas à la juridiction, le juge détermine, s’il y’a lieu de prévoir une rémunération et si tel est le cas, la fixe.

Il convient cependant de préciser que lorsqu’elle constitue un préalable obligatoire au recours contentieux en application d’une disposition législative ou réglementaire, la médiation présente un caractère gratuit pour les parties.

La médiation est également possible dans le cadre d’une action de groupe, étant entendu qu’elle est réservée aux associations agrées et à celles régulièrement déclarées depuis au moins 5 ans et dont l’objet statutaire est la défense d’intérêts auxquels il a été porté atteinte.

Tout accord obtenu dans le cadre d’une action de groupe doit être homologué par le juge.

3. La convention de procédure participative

L’article 9 de la loi du 18 novembre 2016 modifie les articles 2062 et suivants du Code civil.

Pour rappel, la convention de procédure participative est une convention dans laquelle deux parties en litige s’engagent à trouver conjointement une résolution amiable à leur différend.

Alors que l’article 2062, dans sa formulation antérieure, limitait l’utilisation de la convention de procédure participative aux cas de figure où le juge n’était pas encore saisi, il est désormais possible d’utiliser cette convention alors même que le juge serait déjà saisi.

Ainsi, les plaideurs peuvent, en cours d’instance, tenter de chercher des solutions alternatives à la voie judiciaire pour le règlement des différends.

4. La transaction

Dans son ancienne rédaction, la transaction était définie comme :

« le contrat par lequel les parties terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître ».

Dans sa nouvelle rédaction, l’article 2044 du Code civil prévoit que :

La transaction est un contrat par lequel les parties, par des concessions réciproques, terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître.

En insistant sur la notion de « concessions réciproques », le législateur a voulu renforcer la dimension contractuelle de la transaction.

L’article 2052 du Code civil est modifié comme suit :

La transaction fait obstacle à l’introduction ou à la poursuite entre les parties d’une action en justice ayant le même objet.

Dans un tel cas, la sanction sera la fin de non-recevoir.

5. Les lois expérimentales

La loi de 2016 prévoit un certain nombre de mesures expérimentales de modes alternatifs de règlement des différends.

Ainsi, en matière administrative (art. 5, IV de la loi), pendant 4 ans à compter de la promulgation de la loi, (i) les recours contentieux formés par certains fonctionnaires à l’encontre d’actes relatifs à leur situation personnelle et (ii) les requêtes relatives aux prestations, allocations ou droits attribués au titre de l’aide ou de l’action sociale, du logement ou en faveur des travailleurs privés d’emploi, peuvent faire l’objet d’une médiation préalable obligatoire.

Ainsi, une procédure de médiation obligatoire est prévue par cette loi à peine d’irrecevabilité.

De la même manière, en matière familiale (art. 7 de la loi 2016-1547), à peine d’irrecevabilité que le juge peut soulever d’office, la saisine du juge par le ou les parents doit être précédée d’une tentative de médiation familiale, sauf :

  • si la demande émane conjointement des deux parents afin de solliciter l’homologation d’une convention.
  • si l’absence de recours à la médiation est justifiée par un motif légitime.
  • et si des violences ont été commises par l’un des parents sur l’autre parent ou sur l’enfant.

On peut s’interroger sur la compatibilité de la médiation, notion impliquant une attitude volontaire et consensuelle des parties, et donc non imposée, avec le terme « obligatoire ».

En effet, la définition même de la médiation renvoi à la notion de liberté de choix puisque le médiateur, que la procédure soit proposée par le juge ou initiée par les parties, est supposé être choisi par les parties ou désigné par la juridiction mais avec l’accord des parties.

L’idée semble être de vouloir privilégier au maximum les modes alternatifs de règlement des différends afin de désengorger les juridictions.

Marie-Adélaïde de Montlivault-Jacquot
Pierre Guynot de Boismenu
Lexing Contentieux informatique

(1) Loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle (JO du 19-11-2016)
(2) MARC, MARL ou MARD : les modes alternatifs de résolution de conflits (MARC), de litiges (MARL) ou de différends (MARD) sont des techniques privilégiant différentes formes de médiation à un processus judiciaire plus long, plus contraignant et plus onéreux.

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