L’usage des drones à des fins de sécurité publique

L'usage des drones à des fins de sécurité publiqueVirginie Bensoussan Brulé s’exprime sur l’usage des drones équipés de caméras par les forces de l’ordre à des fins de prévention des atteintes à la sécurité publique pour les Visiteurs du soir du dimanche 21 mai 2023. Frédéric Taddeï et ses invités débattent des grandes questions du XXIe siècle dans les Visiteurs du soir pour CNews.

L’usage des drones équipés de caméras par les forces de l’ordre

Une réglementation récente encadre la captation et l’utilisation d’images de drones par les forces de l’ordre à des fins de sécurité publique.

La technologie est neutre bien que les drones présentent des spécificités : possibilité de filmer de haut, vision « grand angle », zone géographique couverte importante, capacité à se déplacer, enregistrement et transmission en temps réel des images.

La règlementation applicable se compose de :

L’usage des drones à des fins de prévention des atteintes à la sécurité publique

  • Ces textes encadrent strictement l’usage des drones à des fins de sécurité publique :
    • prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés à des risques de trafic d’armes ou de stupéfiants notamment ;
    • sécurité des manifestations ;
    • prévention d’actes de terrorisme ;
    • régulation des flux de transport ;
    • surveillance des frontières ;
    • secours aux personnes.
  • De nombreuses garanties entourent leur emploi :
    • autorisation préalable, écrite et motivée du préfet ;
    • interdiction de capter le son, de recourir à de la reconnaissance faciale, de procéder à des mises en relation automatisées avec d’autres traitements de données ;
    • durée de conservation limitée des enregistrements ;
    • dispositifs techniques permettant de garantir l’intégrité des enregistrements jusqu’à leur effacement ;
    • information du public, droits des personnes concernées.

Dans cette circonstance, l’usage des drones à des fins de sécurité publique :

  • ne porte pas atteinte à la vie privée,
  • ne constitue pas une atteinte disproportionnée aux droits et libertés individuelles et collectives.

Requête aux fins de suspension du décret du 19 avril 2023

L’Association de Défense des Libertés Constitutionnelles (Adelico) a déposé une requête devant le juge des référés du Conseil d’Etat tendant à la suspension du décret du 19 avril 2023,

Dans celle-ci, elle soutient que l’utilisation de drones par les forces de l’ordre dans le cadre de manifestations pourraient permettre d’identifier les personnes dans des situations d’expressions d’opinions politiques ou syndicales ou de convictions religieuses.

Ceci constituerait de fait un traitement de données personnelles sensibles au sens de l’article 10 de la directive Police Justice (Directive 2016/680 du 27 avril 2016). Et celui-ci ne pourrait être mis en œuvre qu' »uniquement en cas de nécessité absolue« .

Or, les forces de l’ordre ne procèdent à aucun traitement des données pouvant être révélées indirectement par les images issues des drones, telles que l’opinion politique ou syndicale ou les convictions religieuses des manifestants. Celles-ci ne sont que déduites intellectuellement.

Il convient donc :

  • d’écarter la qualification de données sensibles et
  • de retenir que les :
    • données révélant indirectement de l’opinion politique ou syndicale ou les convictions religieuses des manifestants relèvent des données à caractère « hautement personnel » et
    • garanties apportées par la nouvelle règlementation sont appropriées pour les droits et libertés des personnes concernées.

En conséquence, le Conseil d’Etat a rejeté la requête aux fins de suspension du décret du 19 avril 2023. Il a en effet jugé :

« qu’il n’existe pas de doute sérieux sur la légalité de ce décret, compte tenu des garanties que le cadre juridique défini par la loi et le décret offre quant au respect des exigences de protection de la vie privée et des données personnelles issues du droit français et européen ».

Portrait

Avocate à la Cour d’appel de Paris, Virginie Bensoussan-Brulé dirige le pôle Contentieux du numérique de Lexing Alain Bensoussan Avocats.

Nommée Best Lawyer en Data protection et Data security du classement de la revue américaine Best Lawyers, édition 2023.

Enfin, elle participe à La Clinique des Droits humains numériques à Dauphine.  Cette formation offre aux étudiants la possibilité de mettre à profit leurs connaissances juridiques pour contribuer à la prévention des cyberviolences aux côtés de l’ONG Respect Zone.

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