Marques collectives simples ou de certification : quelle différence ?

Marques collectives simples ou de certification : quelle différence ?L’année 2015 serait-elle l’année des marques collectives ? Le premier trimestre semblerait l’augurer, marqué par deux décisions de la Cour d’appel de Paris saisie de demandes de requalification de marques collectives simples en marques collectives de certification.

Pour rappel (1), la marque collective de certification a pour fonction principale de garantir aux consommateurs, dans un objectif d’intérêt général, le respect d’un référentiel de qualité des produits ou services, à la différence de la marque collective simple dont la fonction est d’indiquer au consommateur l’origine des produits ou services proposés par un groupement promu via cette marque.

La distinction est d’importance, les conditions de validité de la marque collective de certification étant beaucoup plus strictes que celles de la marque collective simple. Notamment, le dépôt de la marque collective de certification doit être accompagné d’un règlement déterminant ses conditions d’usage (2) ; à défaut, le couperet de l’annulation est inéluctable. Cette qualification est d’autant plus redoutable qu’elle ne dépend pas uniquement de la volonté du déposant mais s’apprécie au regard des conditions réelles d’exploitation. Toutes les marques collectives sont donc susceptibles d’être requalifiées a posteriori de marques de certification, et être annulées le cas échéant.

Dans sa décision en date du 13 janvier 2015 (3), la première Chambre du Pôle 5 de la Cour d’appel de Paris relève que le règlement d’usage associé à la marque française PALACE n°103 780 003 ne porte que sur des services hôteliers, à l’exclusion des autres services revendiqués par la marque ; elle en déduit pour ces derniers, contrairement aux juges de première instance (4), que la demande de requalification est infondée. Ayant dans un premier temps prononcé la nullité de la marque PALACE pour les services hôteliers en raison de son caractère descriptif, la motivation de la décision de la Cour d’appel ne permet pas de savoir si elle aurait, à l’instar du tribunal de grande instance de Paris, considéré que la marque PALACE était une marque collective de certification.

La décision du 13 mars 2015 (5) est en ce sens plus instructive, dans la mesure où elle contient des éléments d’analyse sur la nature de la marque figurative « Logis de France » n°073 539 387. Adoptant l’argumentation du titulaire de la marque, elle retient que la finalité de cette marque n’est pas de « garantir dans l’intérêt général, la conformité de produits ou services à des exigences et caractéristiques prédéterminées », mais au contraire que la marque « présente, en réalité , les caractéristiques d’une marque collective ordinaire exploitée dans l’intérêt collectif des membres du groupement mais propre à celui-ci et tend à distinguer les professionnels qui y adhèrent de leurs concurrents ». La première Chambre du Pôle 5 de la Cour d’appel de Paris infirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 15 mai 2014 qui avait qualifié la marque de marque collective de certification (6).

Si l’on ne peut parler d’une ligne jurisprudentielle entre les deux Chambres du fait des différences de faits entre les deux affaires, ces deux décisions viennent en tout cas conforter les critères de distinction entre marques collectives simples et marques collectives de certification identifiés dans des décisions précédentes, rares mais constantes(7).

Ces deux décisions rappellent enfin à la plus grande prudence les titulaires de marque collective simple dans l’exploitation de leurs titres : les appréciations très différentes entre le tribunal de grande instance de Paris et la Cour d’appel de Paris soulignent que la frontière entre marque collective simple et marque collective de certification est autant ténue que flottante.

Anne-Sophie Cantreau
Pierre Chaffenet
Lexing Droit des marques

(1) Juristendances Informatique et Télécoms n°149, sept. 2014 ; Lire notre Post du 15-9-2014.
(2) CPI, art. L715-2.
(3) CA Paris, Pôle 5 Ch. 1, 13 janvier 2015, RG n°13/12820.
(4) TGI Paris, 3ème Ch. 2ème Sect., 21 juin 2013, RG n°11/16712.
(5) CA Paris, Pôle 5 Ch. 2, 13 mars 2015, RG n°14/12664.
(6) TGI Paris, 3ème Ch. 4ème Sec., 15 mai 2014, RG n°12/16452.
(7) Exemples : TGI Paris 21-6-2013, 3e ch. 2e sect., RG 11/16712 ; CA Grenoble 24-9-2007, RG 05/00289 ; Cass. com. 3-6-2008, A votre service c/ Société Al Hayat ; Lire notre Post du 1-7-2009.

Retour en haut