Photos d’actrice sur un site : compétence du juge français

Photos d’actrice sur un site : compétence du juge françaisLes photos d’une actrice sur un site internet sont protégées par les droits d’artiste interprète et droit à l’image. Dans un arrêt du 21 janvier 2016, la Cour d’appel de Versailles a confirmé la compétence du juge français afin de connaître des atteintes aux droits d’artiste interprète et au droit à l’image d’une actrice française dont des photos d’elle avaient été diffusées sur un site belge. La diffusion des photos de l’actrice, sans son autorisation, la montrant dans un moment d’attente entre deux prises ou lors d’une pause sur un tournage constitue une atteinte à son droit à l’image et à ses droits d’artiste interprète.

Dans cette affaire, un site belge a diffusé une douzaine de photos montrant l’actrice en partie dénudée sur la plage à l’occasion du tournage d’un film, annoncées par le titre « M. X. se laisse voir seins nus sur le tournage ».

L’actrice a assigné la société belge devant le Tribunal de Grande Instance de Nanterre qui a condamné cette dernière.

La société belge a interjeté appel, soulevant l’incompétence du juge français sur le fondement de l’article 2.1 du règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil du 22 décembre 2000 qui pose le principe de la compétence de la juridiction du lieu du défendeur.

La Cour d’appel de Versailles a débouté la société belge de ses demandes et a confirmé le jugement. En effet, les juges ont rappelé l’article 5.3 du règlement qui dispose que « au titre des compétences spéciales, une personne domiciliée sur le territoire d’un Etat membre peut être attraite, dans un autre Etat, en matière délictuelle ou quasi délictuelle, devant le tribunal du lieu où le fait dommageable s’est produit ou risque de se produire ».

Les juges ont cité l’arrêt eDate Advertising et Martinez du 25 octobre 2011, à l’occasion duquel la CJUE avait estimé, concernant une atteinte aux droits de la personnalité d’un artiste, que la personne lésée a la faculté de saisir la juridiction de l’Etat membre dans lequel se trouve le centre de ses intérêts.

En revanche, dans un arrêt du 22 janvier 2015 (1), la CJUE a estimé qu’en cas d’atteinte aux droits d’auteur et aux droits voisins, cette juridiction n’est compétente que pour connaître du seul dommage causé sur le territoire de son ressort.

Au regard de ces deux arrêts, la Cour d’appel de Versailles a jugé que le centre des intérêts de l’actrice française était bien situé en France puisqu’elle est « une actrice française, née en France où elle travaille et réside avec sa famille » et que « le fait dommageable allégué a été constaté par huissier en France où le contenu du site Internet de la société belge est accessible ».

Le juge français était donc compétent pour connaître de l’atteinte alléguée à son droit à la personnalité pour la réparation de l’intégralité du dommage causé et de l’atteinte à ses droits voisins d’artiste-interprète pour le seul dommage causé sur le territoire français.

Sur le fond, la Cour a considéré que la fixation puis la diffusion de la prestation de l’actrice, sans son autorisation, en plus tronquée, constituent une atteinte à ses droits d’artiste interprète et que les clichés la montrant dans un moment d’attente entre deux prises ou lors d’une pause constitue une atteinte à son droit à l’image, peu importe que le tournage se soit déroulé dans un lieu public.

Marie Soulez
Andréa Nehmé
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(1) CJUE, 22-1-2016, aff C‑441-13 Pez Hejduk.

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