Les plateformes en ligne et la lutte contre la fraude

lutte contre la fraudeL’administration fiscale rappelle les obligations des opérateurs de plateformes en matière de lutte contre la fraude.

Les nouvelles dispositions (1) sont codifiées principalement à l’article 242 bis du CGI (art. 242 bis, 283 bis et 23 L sexies à 23 L undecies de l’annexe 4 du Code général des impôts).

Elles sont issues des articles 10 et suivants de la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude fiscale, qui ont mis à la charge des opérateurs de plateforme de mise en relation par voie électronique de nouvelles obligations.

Pour l’application aux opérateurs de plateforme en ligne des obligations prévues à l’article 242 bis du CGI, il convient d’analyser les points suivants :

  • territorialité du dispositif ;
  • opérateurs de plateforme concernés ;
  • utilisateurs concernés ;
  • transactions concernées.

La territorialité du dispositif en matière de lutte contre la fraude

En application du premier alinéa de l’article 242 bis du CGI est concernée par ces nouvelles obligations « l’entreprise, quel que soit son lieu d’établissement, qui en qualité d’opérateur de plateforme met en relation à distance, par voie électronique, des personnes en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service ».

Ces nouvelles dispositions concernent toutes les plateformes de mise en relation par voie électronique « quel que soit leur lieu d’établissement, qu’elles soient établies sur le territoire français ou dans un autre Etat ou territoire ».

Cependant, le dernier paragraphe de ce même article limite son périmètre d’application en précisant que ces obligations s’appliquent « à l’égard des utilisateurs de plateforme résidant en France ou qui réalisent des ventes ou des prestations de service en France au sens des articles 258 à 259 D (CGI) ».

En conséquence, ces obligations n’incombent qu’aux « opérateurs de plateforme établis en France ou à l’étranger, dès lors qu’ils ont des utilisateurs réalisant des ventes ou des prestations de service situées en France au sens des règles de territorialité applicables en matière de TVA ».

Les opérateurs de plateforme concernés par la lutte contre la fraude

Les obligations de l’article 242 bis du CGI sont applicables aux « entreprises qui, en qualité d’opérateurs de plateforme, mettent en relation à distance, par voie électronique, des personnes en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service ».

Il peut s’agir, bien que ces exemples ne soient pas exhaustifs, de plateformes qui assurent la mise en relation de personnes dans le but de réaliser les opérations suivantes :

  • vente ou revente de biens de toute nature (biens immobiliers, biens d’équipements, biens culturels, billets de spectacle, billets de manifestation sportives, véhicules, pièces détachées, outils, produits alimentaires bruts ou élaborés, avec ou sans livraison) ;
  • location de biens immobiliers ou de leurs accessoires (meublé de tourisme, location ou colocation d’un bien immobilier nu ou meublé, location de piscine, location de terrain de sport, location de jardin ou d’espace naturel) ;
  • location de biens mobiliers (véhicule terrestre, bateau ou avion, outils divers, biens électroménagers)
  • transport de personnes ou d’objets (taxi, voiture de tourisme avec chauffeur (VTC), transport de marchandises) ;
  • co-consommation (co-voiturage, organisation de repas (co-cooking), sortie en mer) ;
  • fourniture d’une prestation ou d’un service (entretien de la maison ou des biens d’équipements de la personne, travaux de jardinage, aide à la personne, garde d’enfants, soutiens scolaires, cours sportifs, garde des animaux, conseils divers) ;
  • financement participatif de projets par des particuliers.

Le recours à la sous-traitance

Le fait que l’opérateur de la plateforme ait recours à des sous-traitants pour effectuer les transactions ou pour assurer leur paiement ne modifie pas l’étendue de ses obligations.

Cependant, leur étendue diffère selon que l’opérateur a connaissance ou non de la conclusion effective des transactions par leurs utilisateurs.

C’est ainsi que l’obligation mise à la charge des opérateurs de plateforme d’adresser un état récapitulatif à leurs utilisateurs (CGI, article 242 bis 2°) et de transmettre à l’administration fiscale un document mentionnant les mêmes informations (CGI, article 242 bis 3°) concerne uniquement les opérateurs ayant connaissance de la conclusion d’une transaction par leurs utilisateurs (BOI-BIC-DECLA 30-70-40-10 n°60).

L’opérateur est réputé en avoir connaissance si « son système d’information lui permet à la fois d’avoir connaissance du principe de la réalisation effective d’une transaction, et du montant du paiement convenu entre les parties ».

Lorsque l’opérateur de plateforme sous-traite les opérations de paiement de cette transaction à un tiers, il est réputé avoir connaissance de la conclusion d’une transaction, compte tenu du lien de subordination existant entre le sous-traitant et son donneur d’ordre.

En revanche, même lorsqu’ils n’ont pas connaissance de la conclusion effective des transactions de leurs utilisateurs, les opérateurs de plateforme restent tenus de fournir, à l’occasion de chaque transaction, une information loyale, claire et transparente sur les obligations fiscales et sociales qui incombent aux personnes qui réalisent des transactions commerciales par son intermédiaire (CGI, article 242 bis, 1°).

Les utilisateurs concernés

Au sens de l’article 242 bis du CGI, un utilisateur de plateforme se définit comme « une personne physique ou morale, agissant en qualité de professionnel ou non, qui propose à un tiers, de manière occasionnelle ou habituelle, la vente de biens, la fourniture d’un service ou l’échange ou le partage d’un bien ou d’un service au travers d’offres publiées par l’opérateur de la plateforme considérée ».

Cependant, les obligations prévues par l’article 242 bis du CGI ne s’appliquent qu’à l’égard des « utilisateurs de plateformes résidant en France ou qui réalisent des ventes ou des prestations de service en France au sens des articles 258 à 259 du CGI » (CGI, article 242 bis, dernier alinéa).

En application des règles générales prévues par l’article 259 du CGI, le lieu des prestations de services est réputé se situer en France lorsque le preneur est un assujetti agissant en tant que tel et qu’il a en France le siège de son activité économique, sauf lorsqu’il dispose d’un établissement stable non situé en France auquel les services sont fournis, ou un établissement stable auquel les services sont fournis, ou, à défaut, son domicile ou sa résidence habituelle.

Par dérogation à l’article 259 du CGI, la détermination du lieu d’imposition de certaines prestations de services s’effectue en fonction d’autres critères que celui de la qualité du preneur, en application de l’article 259 A du CGI, de l’article 259 B du CGI, de l’article 259 C du CGI et de l’article 259 D du CGI.

Les transactions concernées

Les obligations des opérateurs de plateformes en application de l’article 242 bis du CGI sont, enfin, applicables à l’occasion de transactions entre utilisateurs de la plateforme.

Une transaction est réputée réalisée dès lors que « les parties s’entendent, au travers du dispositif technique offert par l’opérateur de la plateforme, sur les termes et conditions de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service, de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service ».

Les transactions visées par ces nouvelles obligations concernent les transactions réalisées en France au sens des règles de territorialité de la TVA.

Pierre-Yves Fagot
Lexing Droit de l’entreprise

(1)  BIC – Régimes d’imposition et obligations déclaratives – Obligations des opérateurs de plateformes de mise en relation par voie électronique BOI-BIC-DECLA 30-70-40-10 du 07-01-2020.

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