Vers un encadrement juridique des plateformes en ligne

La tendance est à l’encadrement de l’activité des plateformes en ligne (marketplaces, plateformes collaboratives, etc.).

Après les sites de commerce électronique et, plus récemment les sites comparateurs (1), de nouvelles obligations vont incomber aux plateformes en ligne.

En effet, la récente loi Macron (2) est venue introduire dans le Code de la consommation une obligation d’information, de loyauté et de transparence à la charge des plateformes en ligne.

Ainsi, outre l’obligation générale d’information mise à la charge des professionnels à l’égard de tout consommateur (3), et celle imposée aux e-commerçants par la loi pour la confiance dans l’économie numérique (4), le nouvel article L.111-5-1 dudit Code précise que « toute personne dont l’activité consiste à mettre en relation, par voie électronique, plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service est tenue de délivrer une information loyale, claire et transparente sur les conditions générales d’utilisation du service d’intermédiation et sur les modalités de référencement, de classement et de déréférencement des offres mises en ligne ».

Cette obligation d’information doit également, lorsque sont mis en relation via la plateforme des consommateurs ou non-professionnels, porter sur la qualité de l’annonceur et les droits et obligations des parties en matière civile et fiscale.

Enfin, lorsque la plateforme a vocation à mettre en relation des consommateurs avec des professionnels, vendeurs ou prestataires de services, la plateforme doit mettre à la disposition de ces derniers un espace dédié leur permettant de communiquer aux consommateurs les informations obligatoires que tout commerçant électronique doit porter à l’attention de telles personnes (5).

Les opérateurs ne se conformant pas à ces obligations pourront se voir imposer une amende administrative pouvant aller jusqu’à 375 000 € (6).

Si le décret devant préciser le contenu de ces informations et les modalités de leur communication aux internautes n’est pas encore paru, de nouvelles dispositions actuellement en préparation pourraient déjà venir modifier les termes de ce nouveau régime juridique.

En effet, le projet de loi pour une République Numérique, également désigné sous le nom de projet de loi Lemaire, récemment publié, prévoit, dans sa version actuelle, un renforcement des obligations à la charge de ces plateformes sous une section 3 intitulée « Loyauté des plateformes ».

Notamment, l’article 13 de ce projet vient définir la plateforme en ligne comme « les activités consistant a` classer ou référencer des contenus, biens ou services proposés ou mis en ligne par des tiers, ou de mettre en relation, par voie électronique, plusieurs parties en vue de la vente d’un bien, de la fourniture d’un service, y compris a` titre non rémunéré, ou de l’échange ou du partage d’un bien ou d’un service ». La notion d’opérateur de plateforme en ligne est également introduite.

Cet article vient en outre préciser l’obligation d’information à la charge de ces plateformes ajoutant que « Toute plateforme en ligne est tenue de délivrer une information loyale, claire et transparente sur les conditions générales d’utilisation du service d’intermédiation qu’elle propose et sur les modalités de référencement, de classement et de de´référencement des contenus, biens ou services auxquels ce service permet d’accéder. Elle fait notamment apparaître clairement l’existence ou non d’une relation contractuelle ou de liens capitalistiques avec les personnes référencées ; l’existence ou non d’une rémunération par les personnes référencées et, le cas échéant, l’impact de celle-ci sur le classement des contenus, biens ou services proposés ».

Enfin, l’article 14 de ce projet de loi précise que l’autorité administrative veillera au respect par les plateformes en ligne des dispositions susvisées. Elle pourra, à cette fin :

  • encourager la diffusion de bonnes pratiques élaborées en concertation avec les entreprises du secteur et les associations de consommateurs ;
  • déterminer le degré de précision et le format de mise à disposition des informations à porter à la connaissance des internautes (ex : standard ouvert) ;
  • définir après consultation des organisations professionnelles concernées et des associations de consommateurs des indicateurs permettant d’apprécier et de comparer les pratiques mises en œuvre par les plateformes en ligne, et publier elle-même les résultats de ces indicateurs si elle estime que les informations mises à dispositions des internautes ne sont pas suffisantes ;
  • recueillir les informations et procéder aux enquêtes nécessaires à l’exercice des compétences qui lui ainsi sont dévolues puis mettre éventuellement à disposition du public, sous réserve des secrets protégés par la loi, les informations collectées dans ce cadre.

Ce nouveau texte, publié via un site internet dédié (7), n’est encore qu’une ébauche à ce stade et peut encore faire l’objet de nombreuses modifications dans le cadre des discussions parlementaires. Toutefois, il est recommandé aux opérateurs de plateformes en ligne de suivre de près les évolutions de ce projet de loi afin d’anticiper les actions de mise en conformité de leurs plateformes qui devront être déployées le cas échéant.

Par ailleurs, il convient de préciser que des évolutions sur le plan européen sont également attendues, la Commission européenne ayant lancé, le 24 septembre dernier, une consultation sur l’environnement réglementaire concernant les plateformes, les intermédiaires en ligne, les données et l’informatique en nuage (cloud), ainsi que l’économie collaborative (8).

Alain Bensoussan
Lexing Droit Marketing électronique

(1) Précédent Post du 17-9-2015.
(2) Loi 2015-990 du 6-8-2015, art.134.
(3) C. Consom., art. L.111-1 et s.
(4) Loi 2004-575 du 21-6-2004, art.19.
(5) C. Consom., art. L.111-5-1.
(6) C. Consom., art. L.111-6-1.
(7) www.republique-numerique.fr.
(8) Commission européenne, Communiqué du 24-9-2015.

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