Rappel des conditions de protection d’un site internet

Rappel des conditions de protection d’un site internetLes conditions de protection d’un site internet ont été rappelées par le Tribunal de grande instance de Paris.

En l’espèce, une société spécialisée dans la vente de détail d’équipements automobiles, estimant que son concurrent avait copié son site internet, a assigné ce dernier en contrefaçon et en concurrence déloyale devant le Tribunal de grande instance de Paris.

Le jugement (1), qui rejette l’ensemble des demandes de la demanderesse, permet de faire le point sur les conditions préalables à la protection d’un site internet.

Pas de contrefaçon en l’absence d’originalité

Si les sites internet sont susceptibles de bénéficier d’une protection au titre du droit d’auteur, encore faut-il qu’ils revêtent un caractère original.

En l’espèce, la défenderesse a soutenu que la présentation du site internet revendiqué par la demanderesse ainsi que son architecture étaient banals au regard d’autres sites marchands opérant dans le même domaine d’activité.

Dans ce cadre, le tribunal a rappelé que l’originalité d’un site internet s’apprécie de manière globale, de sorte que la combinaison des éléments qui le caractérise doit lui conférer, du fait d’un agencement particulier, une physionomie propre qui démontre l’effort créatif et le parti pris esthétique traduisant l’empreinte de la personnalité de son auteur.

Or, selon le tribunal, aucun des éléments avancés par la demanderesse n’était de nature à établir le caractère original du site internet. En particulier, il a été jugé que :

  • en l’absence d’une charte graphique contenant l’ensemble des règles d’utilisation des signes graphiques constituant l’identité graphique du site internet, les « considérations générales descriptives » du site internet avancées par la société demanderesse, telles que la structuration des rubriques par un système d’onglets ou le choix des couleurs noir, rouge et gris, ne suffisaient pas à établir que la présentation du site internet était le résultat d’une recherche esthétique ou d’un effort personnalisé ;
  • de même, l’ordonnancement des rubriques, l’arborescence du site internet et la mise en perspective des produits présentés attestaient plus d’un « savoir-faire commercial » commun à d’autres sites marchands, dès lors que ces éléments permettent seulement de naviguer aisément sur le site internet et répondent à un impératif utilitaire largement répandu pour le commerce en ligne.
Pas de concurrence déloyale en l’absence de faute

Faute pour le demandeur de justifier d’un droit privatif (tel que le droit d’auteur) sur son site internet, celui-ci est recevable à formuler des demandes en réparation du préjudice qu’il a subi au titre de la concurrence déloyale.

Or l’action en concurrence déloyale, fondée sur l’article 1240 du Code civil, suppose l’existence d’un comportement fautif qui :

  • soit, vise à créer un risque de confusion dans l’esprit de la clientèle quant à l’origine du produit proposé ;
  • soit, est de nature parasitaire et tire profit de la valeur économique d’autrui, procurant ainsi un avantage concurrentiel injustifié.

Dans ce cadre, le tribunal a considéré que « l’appréciation de la faute au regard du risque de confusion doit résulter d’une approche concrète et circonstanciée des faits de la cause prenant compte notamment le caractère plus ou moins servile, systématique ou répétitif de la reproduction ou de l’imitation, l’ancienneté d’usage, l’originalité, la notoriété de la prestation copié ».

En l’espèce, le tribunal a relevé qu’il existait de nombreuses différences entre le site internet de la défenderesse et celui de la demanderesse, de sorte qu’il ne s’agissait pas d’une imitation servile du site internet de cette dernière.

De même, le tribunal a estimé que les ressemblances visuelles évoquées par la demanderesse tenaient à la reprise d’éléments qui se trouvent habituellement dans des sites marchands, tels que l’emplacement des fonctions recherche, connexion et contact du service.

Enfin, le tribunal a estimé que la demanderesse n’a pas établi la preuve que la défenderesse avait exploité les efforts, travail ou investissements de la demanderesse lorsqu’elle a procédé à la création de son site internet.

Dans ces conditions, la demanderesse a été également déboutée de ses demandes au titre de la concurrence déloyale.

Alain Bensoussan Avocats
Lexing Contentieux Propriété intellectuelle

(1) TGI Paris, 3e ch.4e sect. 12-1-2017, Sté Mycelium Roulement c./ Sté Todo Material 3L et autres

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