Clap de fin de l’action en contrefaçon pour le groupe The Dø

utilisation d’un sampleLa Cour de cassation s’est prononcée sur l’utilisation d’un sample et l’absence de caractérisation d’une contrefaçon de droit d’auteur et de droits voisins (1).

Rappel des faits : action en contrefaçon intentée par The Dø

Les membres du groupe de musique The Dø ont constaté que l’œuvre « Goodbye » créée par le disc-jockey « Feder » contenait une reprise à l’identique, selon eux, d’un extrait de leur œuvre « The bridge is broken ». Cette reprise de l’interprétation à la guitare de l’introduction du titre aurait été répétée pendant la majeure partie de « Goodbye » ; ce qui caractérise une contrefaçon de droits d’auteur et de droits voisins.

Par jugement du 7 novembre 2019 (2), le tribunal de grande instance de Paris avait rejeté la contrefaçon au titre du droit d’auteur. Mais il a jugé que la reproduction constituait une contrefaçon des droits voisins ; l’œuvre « Goodbye », reproduisant un échantillonnage non autorisé de « The Bridge is broken ».

La Cour d’appel déboute sur la contrefaçon

La Cour d’appel de Paris, le 10 septembre 2021 (3), a infirmé partiellement la décision de première instance. Elle a écarté la contrefaçon au titre des droits voisins et a confirmé l’absence de contrefaçon en droit d’auteur.

S’agissant des droits d’auteur, la Cour d’appel a considéré que la partie de l’œuvre « The bridge is broken » ne constituait pas un « gimmick » (4) mais un « accident d’interprétation » ou « accident de justesse » figurant uniquement en introduction de l’œuvre. Dès lors, elle a considéré que cela ne permettait pas de caractériser la personnalité de l’auteur. Cela ne participait pas non plus à l’originalité de l’œuvre première prise en son ensemble.

Concernant l’atteinte aux droits voisins (5), la Cour d’appel a estimé qu’il n’était pas établi que l’œuvre « Goodbye » avait repris et incorporé un extrait de l’enregistrement de l’œuvre « The bridge is broken ».

L’utilisation d’un sample : la difficile reconnaissance de la contrefaçon

La Cour de cassation a rejeté le pourvoi (6). Elle a considéré que ces constatations relevaient du pouvoir souverain des juges du fond. Par conséquent, elle n’avait pas à procéder à la recherche de la contrefaçon.

La Cour de justice de l’Union européenne (7) avait déjà, par le passé, pu se prononcer sur l’usage des samples. La CJUE avait rappelé que le producteur de phonogrammes dispose d’un droit d’autoriser ou d’interdire la reproduction de son phonogramme. Ce droit lui permet de s’opposer à l’utilisation, par un tiers, d’un sample, même très bref, de son phonogramme aux fins de l’inclusion de cet échantillon dans un autre phonogramme ; ceci, à moins que cet échantillon n’y soit inclus sous une forme modifiée et non reconnaissable à l’écoute.

Cette saga judiciaire fait écho aux difficultés rencontrées, dans le cadre de l’utilisation d’un sample, en matière de contrefaçon de droit d’auteur et de droit voisin. Elle rappelle aussi le rôle central du juge du fond dans l’appréciation de l’existence ou non de la contrefaçon.

Marie Soulez,
Sofia Schein
Lexing Propriété intellectuelle

Notes

(1) Cass. civ. 1, 08-02-2023, n° 21-24.980, Inédit.
(2) TGI Paris, 07-11-2019, n°19-03440.
(3) CA Paris, 10-09-2021, n° 19/22618.
(4) Un gimmick est une cellule de quelques notes qui captent l’oreille de l’auditeur.
(5) Droits du producteur de phonogramme et aux droits d’artiste-interprète.
(6) Cass. 1re civ., 08-02-2023, n° 21-24980.
(7) CJUE, 29-07-2019, aff. C-476/17.

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