Archive interview de juin 2005 JTIT 41/2005

Archive interview de juin 2005


Stéphane Marcovitch,
Délégué Général de l’Association des Fournisseurs d’Accès (*)

Un bilan plutôt positif mais avec encore des incertitudes …

En quoi consiste exactement l’activité de votre association ?

L’AFA regroupe depuis 1997 les fournisseurs d’accès et les fournisseurs de services Internet avec une double objectif : représenter l’ensemble de la profession des intermédiaires techniques vis-à-vis des pouvoirs publics et fixer des règles déontologiques (pratiques et usages, chartes…). A côté de ces activités, l’AFA gère également le site pointdecontact.net, à la fois site d’information du grand public sur tout sujet pouvant l’intéresser (contenus illicites, spam, protection de l’enfance…) et formulaire permettant aux internautes de signaler des contenus pédopornographiques ou incitant à la haine raciale auxquels ils ont pu être confrontés sur Internet (web, forum, chat…). L’AFA est en contact avec les services de police et de gendarmerie pour leur notifier de tels contenus surtout lorsqu’ils sont hébergés en France, afin d’engager les poursuites nécessaires. Si le contenu est hébergé à l’étranger, l’AFA informe alors la hotline partenaire dans le pays concerné grâce au réseau « Inhope » regroupant des hotlines partenaires dans les pays de l’Union européenne, mais aussi aux Etats-Unis, Corée, Australie, Taiwan… Le réseau permet de traiter le problème au niveau local très rapidement sans avoir à mettre en oeuvre la coopération judiciaire internationale.

La LCEN a-t-elle révolutionné les pratiques de vos adhérents ? les échos sont-ils positifs ?

Rappelons que la LCEN est d’abord la transposition de la directive communautaire sur le commerce électronique. Ce texte était très attendu car il était nécessaire de clarifier le régime de responsabilité des intermédiaires techniques. Il a donné lieu a beaucoup de débats notamment sur le projet d’obliger les fournisseurs d’accès (FAI) et hébergeurs à surveiller les contenus illicites. Notre mobilisation a été payante puisque cette obligation s’est muée en une obligation de signalement qui, dans la déontologie de l’AFA, existait déjà et a donc été généralisée à l’ensemble des FAI et hébergeurs. La solution est moyennement satisfaisante en ce qui concerne la coupure par les hébergeurs une fois qu’ils ont connaissance d’un contenu illicite. Notre souhait était une coupure sur décision de justice car, hormis les cas flagrants, le FAI n’est pas toujours à même de décider si le contenu qu’on lui soumet est licite ou non, notamment en matière de contrefaçon et de diffamation. Même si l’option retenue par le législateur ne concerne finalement que les contenus «manifestement» illicites, il risque d’y avoir des cas dans lesquels la responsabilité des hébergeurs sera engagée … tout dépendra de l’interprétation des juges(1). Le bilan est plutôt positif mais avec encore des incertitudes sur la mise en œuvre de cette loi.

Quelles sont selon vous, les questions que la loi n’a pas encore résolues ?

Celles relatives aux poursuites pénales des spammeurs. L’AFA souhaitait qu’à l’occasion de ce texte, les prestataires de messageries (fournisseurs d’accès ou de webmail) aient la possibilité d’engager de telles poursuites dissuasives. Or, ils ne le peuvent qu’en ayant recours à la loi Godfrain sur la fraude informatique dans le cas très exceptionnel où le spam aurait été tellement massif qu’il aurait paralysé le serveur. On sait que les particuliers portent rarement plainte, c’est pourquoi, nous souhaitions que les prestataires de services puissent bénéficier des mêmes droits que les parties civiles et forcer ainsi le déclenchement de l’action publique. Nous allons néanmoins continuer d’œuvrer pour l’obtenir…

 

(*) http://www.afa-france.com/

(1) TGI Paris, 17ème ch, 15/11/2004,
http://www.foruminternet.org/telechargement/wp-content/uploads/tgi-par20041115.pdf

Interview réalisée par Isabelle Pottier, avocat.

Parue dans la JTIT n°41 /2005 p.10

 

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