Les dispositifs médicaux numériques ou à base d’Intelligence Artificielle remboursés

dispositifs médicaux numériques

Les porteurs de dispositifs médicaux numériques ou à base d’Intelligence Artificielle peuvent désormais déposer leurs dossiers pour soutenir le financement de leurs projets et en demander le remboursement.

Ouverture de l’appel à projets

Un récent arrêté ministériel a approuvé le cahier des charges d’un appel à projets de tels dispositifs médicaux numériques (1). Le cahier des charges est consultable sur les sites internet de Bpifrance et du secrétariat général pour l’investissement.

Cet appel à projets prévoit que les résultats des projets devront directement permettre de justifier l’utilisation pratique du dispositif testé. La date limite de dépôt des dossiers a été fixée au 2 mars 2022 à 12h (midi heure de Paris).

Cet arrêté intervient quelques jours après qu’un dispositif médical embarquant de l’intelligence artificielle auto-apprenante ait été admis au remboursement (2). C’est l’occasion de faire le point sur la prise en charge par l’Assurance maladie de tels dispositifs.

Dépôt des dossiers de demande de remboursement notamment de DM embarquant de l’Intelligence Artificielle

La HAS a actualisé son guide de dépôt des dossiers pour prendre en compte les dispositifs médicaux dotés d’Intelligence Artificielle (3). Les industriels doivent suivre ce guide pour formuler une demande de remboursement de tels dispositifs médicaux (4).

Pour rappel, la CNEDiMTS (Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé) est une commission spécialisée de la HAS. Elle évalue les dispositifs médicaux destinés aux patients pour décider de leur remboursement ou non par l’Assurance maladie. Rappelons en outre que l’évaluation ne peut intervenir avant l’obtention de leur marquage CE.

En suivant une grille, les industriels peuvent ainsi objectiver les caractéristiques de leur dispositif médical. Ils peuvent aussi apporter à la HAS tous les éléments nécessaires à l’évaluation de leur produit.

La HAS indique, dans ce guide, une description des fonctionnalités s’appuyant sur des procédés d’apprentissage automatique (technologies relevant de l’Intelligence Artificielle).

Elle indique ainsi :

  • « Pour les dispositifs médicaux embarquant des systèmes décisionnels s’appuyant sur des procédés d’apprentissage automatique, la description des fonctionnalités construites ou évoluant à l’aide de ces technologies est attendue.
  • Pour ce faire, vous devez utiliser la grille descriptive spécifique située en annexe pages 45 et suivantes. Elle vous servira de support pour décrire notamment le rôle de chaque fonctionnalité concernée, les caractéristiques des données exploitées, les résultats obtenus et les modalités de fonctionnement de l’algorithme ».

Comment évaluer le composant algorithmique des dispositifs médicaux numériques ou recourant à l’Intelligence Artificielle ?

La grille descriptive développée par la CNEDiMTS permet d’évaluer le composant algorithmique des dispositifs médicaux utilisant l’intelligence artificielle. La partie auto-apprenante est ainsi évaluée à l’aide des critères suivants :

  • la finalité d’usage (l’usage revendiqué et le domaine d’application prévu du dispositif médical) ;
  • les échantillons utilisés pour l’apprentissage initial ou le réapprentissage du modèle ;
  • les données d’entrée impliquées dans l’apprentissage initial ou le réapprentissage du modèle ;
  • les données d’entrée impliquées dans la décision (une fois le dispositif médical déployé) ;
  • les caractéristiques fonctionnelles : la performance de l’algorithme en vue de sa validation ; la robustesse du système ; et
  • les procédés d’explicabilité et d’interprétabilité mis en œuvre.

Cette grille permet à l’industriel d’apporter à la CNEDiMTS des éléments de compréhension clés relatifs à :

  • la technologie en question,
  • sa finalité ou sa conception.

Il s’agit pour lui de construire une ou plusieurs grilles ; le principe étant qu’il renseigne une grille pour chaque fonctionnalité « intelligente » du dispositif.

Classification par la HAS des solutions numériques en santé selon leur finalité d’usage

Comment faire face à la grande diversité des solutions numériques existantes dans le domaine de la santé ? La HAS a donc publié début 2021 une grille de classification fonctionnelle des solutions numériques selon leur finalité d’usage (5).

Cette grille permet ainsi de distinguer les finalités d’usage suivantes :

  1. Service support aux patients, aux aidants ou aux professionnels de santé, comme par exemple :
    • Dossier médical partagé (DMP) ;
    • Dossier Pharmaceutique (DP) ;
    • Application de messagerie instantanée ;
    • Plateforme de communication avec les soignants ;
  2. Information générale de l’utilisateur non personnalisée, comme par exemple :
    • Système proposant des conseils sur l’alimentation ;
    • Système proposant des informations sur une pathologie ;
  3. Aide notamment à la prévention, au dépistage, au diagnostic, à l’observance, autosurveillance, télésanté, sans autonomie de la solution numérique, comme par exemple :
    • Système de télésurveillance médicale de type application, web plateforme ou autre, connecté ou non à un outil ou un DM ayant une fonction de mesurage ; et qui transmet des données ou des alertes selon des seuils ou critères fixés par l’utilisateur professionnel à des fins de télésurveillance médicale ;
    • Casque simulation 3D de rééducation ;
    • Tensiomètre de poignet connecté au smartphone du patient uniquement ;
  4. Gestion autonome de la décision après analyse des données et diagnostic, sans intervention humaine, comme par exemple :
    • Défibrillateur cardiaque implanté avec une solution de télésurveillance qui analyse les données issues un moniteur cardiaque, délivre un choc en cas d’arrêt cardiaque et peut transmettre les alertes au professionnel qui suit le patient.

Cette classification permet d’englober les solutions numériques embarquant des systèmes décisionnels s’appuyant sur l’IA et les autres solutions (6).

Évaluation rigoureuse des DM numériques ou embarquant de l’Intelligence Artificielle au centre de l’appel à projets

A cet égard, il est intéressant de noter que le cahier des charges de l’appel à projets opère également une distinction explicite entre le dispositif médical numérique (hors intelligence artificielle) et celui qui en est pourvu.

Cet arrêté définit le dispositif médical numérique comme « tout dispositif médical (DM), dispositif médical implantable actif (DMIA) ou dispositif médical de diagnostic in vitro (DMDIV) dont la composante numérique représente la part prépondérante de l’actif, ou la part prépondérante de la proposition de valeur. »

Il définit par ailleurs l’intelligence artificielle comme « tout algorithme statistique dont les paramètres optimaux ont été entraînés à partir d’un jeu de données de santé représentatif de la population cible ».

L’objectif de cet appel à projets est d’accompagner tant « l’évaluation rigoureuse des dispositifs numériques ou à base d’intelligence artificielle » que de « contribuer à construire la confiance dans ces nouvelles technologies auprès des utilisateurs ».

En conclusion…

La question du remboursement des dispositifs médicaux numériques (hors Intelligence Artificielle) et des dispositifs médicaux embarquant de l’Intelligence Artificielle devient primordiale. Elle l’est tant pour les fournisseurs de systèmes d’intelligence artificielle que pour les politiques de santé.

Il en va de même de la confiance recherchée dans ces nouvelles technologies auprès des utilisateurs. Il s’agit là également de l’objectif recherché par le projet de règlement sur les systèmes d’intelligence artificielle (7). Ce projet a pour but de doter l’Intelligence Artificielle d’un cadre juridique harmonisé au sein de l’Europe et dont il s’agira de suivre l’adoption.

Isabelle Chivoret
Lexing Santé numérique

Notes

(1) Arrêté du 20 09 2021 relatif à l’approbation du cahier des charges de l’appel à projets « Évaluation du bénéfice médical et/ou économique des dispositifs médicaux numériques ou à base d’intelligence artificielle ».
(2) Arrêté du 15 09 2021 sur l’inscription du système de boucle semi-fermée DBLG1 d’une société ayant conçu un pancréas artificiel sur la LPPR (liste des produits et prestations remboursables) au titre de l’article L. 165-1 du Code de la sécurité sociale.
(3) HAS,  Communiqué de presse du 14 octobre 2020.
(4) HAS, Guide – LPPR : Dépôt d’un dossier auprès de la Commission nationale d’évaluation des dispositifs médicaux et des technologies de santé (voir pages 21 et s.).
(5) HAS – Classification fonctionnelle, selon leur finalité d’usage, des solutions numériques utilisées dans le cadre de soins médicaux ou paramédicaux – Validée par le Collège le 4 février 2021.
(6) La qualification d’une solution numérique de dispositif médical demande une évaluation au cas par cas ; en fonction notamment de sa finalité médicale, fixée par le fabricant.
(7) Voir notre article sur le sujet intitulé « Intelligence artificielle : nouveau projet de Règlement » publié le 17 juin 2021.

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