Publication de messages jugés diffamatoires sur un forum

Publication de messages jugés diffamatoires sur un forumLe directeur de la publication d’un site internet est condamné pour publication de messages jugés diffamatoires sur un forum

Dans un arrêt du 10 mai 2016 (1), la Cour d’appel de Lyon a condamné l’association exploitant un site internet ainsi que son directeur de la publication à payer des dommages et intérêts à la société requérante pour des messages publiés sur le forum de son site internet qui ont été jugés diffamatoires.

Par cet arrêt, la Cour d’appel de Lyon a mis fin à un litige de longue date qui opposait l’association exploitant un site internet ayant pour objet des « arnaques » à une société spécialisée dans le secteur de l’édition qui a pour activité la publication d’annonces immobilières sur son site internet.

Ayant remarqué que l’association avait permis la publication sur son forum de messages la visant, la société requérante a sollicité la suppression des propos litigieux devant le Tribunal de grande instance de Montpellier.

Ce dernier a rejeté l’ensemble de ses demandes.

Toutefois, la société a interjeté appel de ce jugement. La Cour d’appel de Montpellier a reconnu dans un arrêt du 14 novembre 2012 que certains messages pouvaient être qualifiés de diffamation.

Ce jugement a néanmoins été cassé et annulé par un arrêt de la Cour de cassation du 11 mars 2014 (2) qui a énoncé que : « Pour être diffamatoire, une allégation ou une imputation doit se présenter sous la forme d’une articulation précise de faits de nature à être sans difficulté, l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire ».

Dès lors, « en retenant que la diffamation doit s’apprécier à l’aune de l’indivisibilité de ces messages qui doivent être lus, interprétés et compris à la lumière des autres auxquels ils répondent ou il sera répondu, sans caractériser pour chacun d’eux l’allégation de faits de nature à être sans difficulté, l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire, la cour d’appel a violé les textes susvisés ».

La société a alors à nouveau soutenu devant la Cour d’appel de renvoi de Lyon que les propos publiés sur le forum du site internet portaient atteinte à son honneur et à sa réputation en ce qu’ils contenaient l’imputation ou l’allégation de faits précis, notamment d’infractions pénales. Elle a fait valoir qu’il convenait de les apprécier en tenant compte de l’ensemble des éléments de contexte, notamment le titre du forum et des discussions, le référencement du forum, la nature du support, ainsi que de la globalité des discussions contenant les propos litigieux.

De son côté, l’association a soutenu en défense que, conformément à l’arrêt du 11 mars 2014 de la Cour de cassation, ne peut être qualifiée de diffamation une allégation ou une imputation qui ne se présente pas sous la forme d’une articulation précise de faits de nature à être sans difficulté, l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire. Les propos litigieux portaient sur les produits et services de la société et non sur la personne morale. En outre, les propos auraient été publiés dans un contexte d’information du public de sujets d’intérêt général et ne seraient donc pas diffamatoires.

Au regard des éléments en présence, la Cour d’appel de Lyon a finalement jugé que certains messages publiés avaient un caractère diffamatoire.

Elle a énoncé « qu’en application des articles 23, 29 et 32 de la loi du 29 juillet 1881 (3), toute allégation ou imputation d’un fait qui porte atteinte à l’honneur ou à la considération de la personne ou du corps auquel le fait est imputé constitue une diffamation, laquelle demeure punissable dès lors qu’elle est commise envers un particulier sous forme de publication directe ou par voie de reproduction, même si elle est faite sous forme dubitative ou si elle vise une personne ou un corps non expressément nommés, mais dont l’identification est rendue possible par les termes des écrits, et par l’un des moyens tels que tout moyen de communication au public par voie électronique ; que pour être diffamatoire, l’allégation ou imputation doit se présenter sous la forme d’une articulation précise de faits de nature à être sans difficulté l’objet d’une preuve ou d’un débat contradictoire ».

Consécutivement, le directeur de la publication du site internet qui n’avait pas retiré ou modéré les propos jugés diffamatoires a vu sa responsabilité engagée et a été condamné in solidum avec l’association exploitant le site internet à payer la somme de 15.000 euros au titre du préjudice subi par la société requérante.

Depuis, le site lesarnaques.com n’est plus accessible et invite les consommateurs à se rendre sur le site internet net-litiges.fr.

Virginie Bensoussan-Brulé
Chloé Legris
Lexing Contentieux numérique

(1) CA Lyon, 10-5-2016, 1e ch. civ., Le Partenaire Européen c/ Lesarnaques.com et M. J. G.
(2) Cass., 1e civ., 11-3-2014, n°13-11706, Bulletin 2014, I, n° 34.
(3) Loi du 29 juillet 1881.

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