interview françois coupez novembre 2008

Interview du mois

Mr François Coupez,
Adjoint du Responsable Juridique CIT, Groupe SOCIÉTÉ GÉNÉRALE (*)

L’archivage des méls dans le secteur bancaire : un chantier de longue haleine

Pouvez-vous nous présenter brièvement votre activité au sein de la Société Générale ?

Les actions du service « Droit de la Communication, de l’Information et des Technologies » sont multiples et concernent tous les aspects de ce que l’on regroupe habituellement sous le terme générique de « droit des nouvelles technologies » : contrats informatiques, gestion des marques, propriété littéraire et artistique, données personnelles, sécurité des systèmes, e-commerce, etc. Quant à moi, j’interviens plus particulièrement sur l’accompagnement juridique des projets technologiques impactant le Groupe SG, comme les projets de dématérialisation, de signature, d’archivage électronique de documents, de services financiers en ligne ou encore de charte d’utilisation des moyens de communication électronique du Groupe. Notre service comprend 16 personnes, dont 14 juristes.

Que pouvez-vous nous dire du « chantier » relatif à l’archivage électronique des méls ?

Nous travaillons sur l’archivage électronique depuis plusieurs années déjà. Nous avons, par exemple, accompagné la direction marketing lors de la mise en place du relevé de compte électronique archivé sur nos systèmes informatiques. Mais la problématique de la gestion des messageries électroniques est plus vaste et plus complexe. D’une part, il peut exister plusieurs solutions de messageries électroniques au sein d’un grand groupe. D’autre part, suivant les pays, il existe des obligations réglementaires parfois très spécifiques (ex. aux Etats-Unis). Or la problématique doit être prise dans sa globalité car les messageries sont souvent des systèmes partagés au plan mondial. Il faut donc gérer la mise en cohérence de l’ensemble des règles des pays concernés. Enfin, les réglementations en gestation, qui peuvent bouleverser la pérennité du chantier en cours, doivent être suivies avec beaucoup d’attention afin d’anticiper au mieux leurs impacts. Comme tous les grands établissements de crédit internationaux et afin de respecter les règles de marché, nous avons organisé l’archivage systématique de certains flux de messagerie, en plus bien sûr des procédures visant à la continuation d’activité en cas d’indisponibilité des serveurs. Mais la question se pose au sein de beaucoup d’établissements d’élargir l’archivage à un spectre plus étendu, compte tenu notamment d’obligations réglementaires grandissantes, d’où la création d’un groupe de travail du Forum des Compétences auquel la SG participe et qui rendra un document détaillé à ce sujet début 2009.

Comment avez-vous résolu le problème des spams et des méls privés ?

Selon plusieurs estimations, les spams représenteraient plus de 90% des méls en circulation. Les archiver serait très coûteux et surtout inutile car ils ne sont à l’évidence pas concernés par les réglementations visant à conserver une trace des échanges dans et hors de l’entreprise. Étant donné que le spam est automatiquement filtré à l’extérieur du système d’information par un prestataire et que son contenu n’a pas été accédé par l’entreprise, il n’est tout simplement pas archivé. Conservé en quarantaine pendant une brève période, il peut toutefois être retrouvé au besoin et téléchargé. Il sera alors archivé comme un mél classique. Tout message privé et personnel, qui doit être spécifiquement labellisé en tant que tel selon une charte d’utilisation des moyens de communication électronique, est traité et archivé comme les autres messages. Mais l’accès à celui-ci sera spécifiquement protégé afin que son contenu reste confidentiel.

Quelle autre difficulté peut-on rencontrer dans l’archivage des mèls ?

Mise à part la capacité serveur (on compte en téraoctets quasiment journaliers) lorsqu’on développe ce genre d’outils, un élément primordial est le développement d’un moteur de recherche simple et efficace, dont l’accès sera bien évidemment très encadré et restreint. Cela permettra de faire face, aux Etats-Unis notamment, aux requêtes ciblées mais souvent volumineuses du régulateur ou du juge (procédure de e-discovery). La vrai problématique est en effet de savoir retrouver l’information que l’on a archivée…


(*)http://www.societegenerale.fr

Interview réalisée par Isabelle Pottier, avocat.

Parue dans la JTIT n°82/2008

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