Covid-19 : retour sur l’interdiction par le Conseil d’Etat de la surveillance par drones

surveillance par dronesAlain Bensoussan revient, dans Planète Robots, sur l’interdiction par le Conseil d’Etat de la surveillance par drones du respect des règles sanitaires.

A l’heure du déconfinement, un constat : les technologies de surveillance ont été en première ligne pour lutter contre la pandémie. La surveillance par drones en fait a partie, non sans soulever des questions relatives à l’atteinte à certaines libertés fondamentales.

Celles-ci ont conduit le Conseil d’Etat, statuant en référé, à en suspendre l’usage à Paris, dans l’attente que le gouvernement revoie sa copie. En cause : le risque d’identification des personnes surveillées

La surveillance par drones

L’État doit « cesser, sans délai, de procéder aux mesures de surveillance par drone, du respect, à Paris, des règles de sécurité sanitaire applicables à la période de déconfinement ». C’est ce que le Conseil d’État a en effet, enjoint à l’Etat par une ordonnance du 18 mai 2020 (1).

Suite à la déclaration de l’état d’urgence, des moyens aériens de la préfecture de police avaient été engagés afin de procéder à une surveillance du respect des mesures de confinement mises en place à compter du 17 mars 2020.

Plusieurs drones de la préfecture de police avaient ainsi été utilisés pour effectuer cette mission de police administrative.

Les risques d’identification des personnes

Bien que les drones n’aient pas été utilisés pour identifier des personnes, mais uniquement pour détecter des rassemblements du public à Paris contraires aux mesures sanitaires en vigueur et pouvoir ainsi procéder à la dispersion du rassemblement ou l’évacuation des lieux, le Conseil d’Etat a estimé qu’une telle utilisation relevait d’un traitement de données à caractère personnel et devait à ce titre, respecter le cadre de la loi informatiques et libertés du 6 janvier 1978.

À l’appui de sa décision, deux constats :

  • des zooms optiques équipent les drones utilisés ;
  • les drones peuvent voler en dessous de 80 mètres, ce qui permet de collecter des données identifiantes.

Il a par conséquent ordonné à l’État de cesser sans délai la surveillance par drones, tant qu’un arrêté ou décret ministériel ne serait pas pris après avis de la Cnil, ou tant que les drones ne seraient pas dotés d’un dispositif de nature à rendre impossible l’identification des personnes filmées.

La protection des données personnelles

Les mêmes contraintes réglementaires que les systèmes de vidéosurveillance et de vidéoprotection (2) s’appliquent à l’usage des drones ; dès lors que des caméras peuvent capter, enregistrer ou transmettre des paroles ou des images de personnes sans leur consentement.

A l’heure du déconfinement, pour Alain Bensoussan, il est une évidence qu’illustre cette affaire :

Il convient plus que jamais de libérer le potentiel des technologies d’identification en prenant en compte l’essence du droit à la protection des données. A condition de mettre en place quelques garde-fous, et de garder présent à l’esprit que la protection de la vie privée s’arrête lorsque l’on est privé de vie » (3).

Isabelle Pottier
Lexing Département Etudes et publications

Alain Bensoussan pour Planète Robots, « Covid-19 : La justice suspend l’usage des drones de surveillance », n°63, Juin-Juillet-Août 2020.

(1) Conseil d’Etat, Ord. Référé du 18 mai 2020, nos 440442, 440445.
(2) A. et J. BENSOUSSAN, I.A. et droits des robots, Larcier 2e éd. 2019.
(3) A. Bensoussan, « Application StopCovid: libérons le potentiel des technologies d’identification », L’Opinion.fr du 26 avril 2020.

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