Trading à haute fréquence : risque d’atteinte au marché

Trading à haute fréquence : risque d’atteinte au marchéLa directive MiFID II du 15 mai 2014 encadre strictement la pratique du trading à haute fréquence (1).

Le nouveau cadre juridique, créé par la directive MiFID II , répond à un besoin justifié par les lacunes de la précédente législation.

A l’époque de la rédaction de la directive MIFID I (2), le trading à haute fréquence était certes utilisé sur les marchés mais était loin de représenter les 40% du volume quotidien des échanges qu’il traite aujourd’hui sur les marchés d’actions européens (3).

Définition technique

Désormais le trading à haute fréquence dispose d’une définition technique puisqu’il s’agit d’une pratique de trading qui envoie 2 messages par seconde pour un instrument particulier sur une plate-forme ou au moins 4 messages par seconde pour l’ensemble des instruments sur une plate-forme (4).

Le meilleur moyen de réduire les risques potentiels liés à une utilisation accrue des technologies est de soumettre à des mesures et à des contrôles spécifiques des risques les entreprises qui pratiquent les techniques de trading à haute fréquence, d’une part, et de renforcer les compétences des autorités de régulation, d’autre part.

Obligations des entreprises d’investissement

Ainsi, dans ce contexte, les entreprises d’investissement sont désormais strictement encadrées dans le cadre de leur pratique du trading algorithmique, puisqu’elles sont tenues de :

  • garantir que leurs systèmes de négociation sont résilients ;
  • garantir que ces systèmes de négociation sont soumis à des seuils et limites de négociation appropriés ;
  • prévenir l’envoi d’ordres erronés ou tout autre fonctionnement des systèmes susceptible de donner naissance ou de contribuer à une perturbation du marché ;
  • mettre en place des plans de continuité des activités efficaces pour faire face à toute défaillance (5).

Toutes ces garanties que l’entreprise d’investissement doit mettre en œuvre, s’expliquent par le fait que ces technologies de négociation sont également sources de risques potentiels, et notamment un risque augmenté de surcharge des systèmes des plates-formes de négociation dû à des volumes d’ordres importants, ou à un risque d’envoi d’ordres erronés ou dupliqués ou encore un risque de dysfonctionnement susceptible de perturber le marché.

Nouvelles compétences des autorités de régulation

La directive MiFID II confère également aux autorités de régulation des nouvelles compétences relatives à l’encadrement du trading à haute fréquence.

A ce titre, ces autorités vont intervenir en tant que personne référente pour les entreprises d’investissement qui recourent au trading algorithmique. En effet, préalablement à la mise en œuvre de leur activité de trading à haute fréquence, ces dernières sont tenues d’effectuer une double notification, auprès de l’autorité de leur Etat membre d’origine, d’une part, et de l’autorité de la plate-forme, d’autre part.

Cette notification constitue un formalisme allégé contrairement à ce que pourrait entraîner une demande d’autorisation, tout en permettant aux autorités de contrôle de disposer d’un état des lieux des opérateurs intervenant sur le marché du trading à haute fréquence.

A compter de la réception de cette notification, l’autorité compétente de l’Etat membre d’origine, pourra demander à lui fournir de façon régulière ou ponctuelle une description de la nature des stratégies ainsi qu’une information sur les paramètres de négociation du système, les tests conduits et toute information complémentaire que pourrait apporter l’entreprise d’investissement. Cette dernière sera tenue de répondre à l’autorité sans délai excessif.

Tenue d’un registre

En outre, les entreprises d’investissement qui mettent en œuvre une technique de trading à haute fréquence devront tenir un registre précis de tous les ordres qu’elles passent, y compris les annulations d’ordres, les ordres exécutés et les cotations sur des plates-formes de négociations, et les mettront à la disposition de l’autorité compétente sur demande (6).

Conclusion

Malgré la nécessité de donner un cadre juridique à cette activité, il n’en demeure pas moins que l’obligation faite à l’entreprise d’investissement de fournir des informations sur son activité de trading à haute fréquence est susceptible de porter atteinte au secret des affaires.

Rappelons, enfin, que la Commission européenne a proposé, le 10 février 2016, le report d’une année, soit au 3 janvier 2018, l’entrée en application des dispositions de la directive précitée et du règlement 600-2014 concernant les marchés d’instruments financiers.

Ce report vise à donner le temps nécessaire aux acteurs pour se mettre en conformité et pour mettre en place les systèmes informatiques nécessaires. Force est de constater que ce report se justifie grandement, dans la mesure où les défis techniques auxquels vont devoir se soumettre les acteurs des marchés et les autorités concernés sont de grande ampleur.

Frédéric Forster
Charlotte Le Fiblec
Lexing Droit Télécoms

(1) Directive 2014/65/UE du 15-5-2014 sur les marchés financiers.
(2) Directive 2004/69/UE du 13-3-2014 concernant les marchés d’instruments financiers.
(3) Etude de Tabb Group.
(4) Commission européenne, Document de travail SWD(2016) 156 final du 18-5-2016.
(5) Directive 2014/65/UE du 15-5-2014, art. 17.
(6) Directive 2014/65/UE du 15-5-2014, art. 17 2° al.5.

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